"Une persécution profondément injuste" : Marine Le Pen a répliqué vendredi sur le terrain politique au renvoi en procès du FN et de deux de ses dirigeants pour des soupçons d'escroquerie aux frais de l'Etat, perspective embarrassante à l'approche de la présidentielle.
Un système pour capter l'argent public en cause. Pour la première fois, le Front national en tant que tel ainsi que deux de ses dirigeants, son premier vice-président Jean-François Jalkh et son trésorier Wallerand de Saint-Just, sont renvoyés en procès pour une affaire autre que des propos polémiques. Plusieurs très proches de Marine Le Pen iront aussi en correctionnelle. Les soupçons portent sur l'existence d'un système pour capter de l'argent public, en profitant des remboursements de l'État pour les frais de campagne.
Vendredi matin, Marine Le Pen a clamé l'innocence de ses troupes : "le Front National est extrêmement serein. Nous sommes la victime d'une persécution profondément injuste", a-t-elle dit. C'est qu'un éventuel procès, dont la tenue avant l'élection présidentielle de 2017 n'est pas à exclure, ternirait le slogan habituel du FN, "mains propres et tête haute", décliné par le passé en affiches, sur les plateaux télés... et jusqu'en savonnettes.
Une procédure qui n'ébranle pas Marine Le Pen. Pour plusieurs dirigeants FN interrogés, ce renvoi en procès ne portera pas préjudice à la candidate à la présidence : Marine Le Pen, qui avait refusé à deux reprises de se rendre à une convocation des juges d'instruction fin 2015 et qui n'a finalement pas été mise en examen, "n'est pas du tout inquiétée", dit l'ancien avocat du FN, Wallerand de Saint-Just. "Les juges, ça, au moins, ils l'ont compris, qu'elle était en dehors du circuit. Elle n'a pas participé à l'organisation des législatives", insiste-t-il. "Nous sommes confiants. Les Français sont lucides", abonde le secrétaire général du parti, Nicolas Bay.
Mais des doutes dans les rangs frontistes. Un frontiste n'est pourtant pas de cet avis : "C'est évident que c'est embêtant. Poser la question, c'est y répondre. Marine, c'est la présidente du Front national", alors que le parti d'extrême droite est lui-même renvoyé en procès. La candidate à la présidentielle pourrait-elle représenter le parti lors d'un procès ? "Ca, c'est de la cuisine interne", balaie Wallerand de Saint-Just.
La semaine avait déjà été placée sous le signe du prétoire mercredi, avec un procès médiatique à Nanterre initié par Jean-Marie Le Pen, co-fondateur du Front national venu contester son exclusion du parti en août 2015 et demander sa réintégration. Le tribunal de grande instance rendra sa décision le 17 novembre.
La campagne présidentielle continue.Dans l'attente de ces deux décisions, Marine Le Pen a voulu reprendre l'initiative sur le terrain politique. Vendredi, elle s'est rendue au Sommet de l'Elevage à Cournon-d'Auvergne, près de Clermont-Ferrand, pour six heures de visites annoncées. Jeudi, quelques heures à peine après l'annonce du renvoi général en procès, a opportunément fuité la localisation du futur siège de campagne de la candidate : le huppé VIIIe arrondissement parisien et la rue du Faubourg Saint-Honoré, la même que l'Elysée, bien qu'1,5km séparent les deux lieux.
La présidente du FN a décidé d'attendre que le nom de ses adversaires à la présidentielle soit connu avant de lâcher les chevaux de la campagne, en février. "Elle a très envie d'y aller mais on est encore dans le temps de la préparation", confie une source proche. Dans l'attente, outre la recherche de financements pour la campagne présidentielle, elle continue son travail de rectification de son image, très clivante : comme Bruno Le Maire, Arnaud Montebourg et Nicolas Sarkozy, elle sera dimanche au menu de l'émission Ambition Intime sur M6, pour un portrait de 30 minutes.