L'eurodéputée insoumise Manon Aubry a dit lundi à l'AFP être inquiète du positionnement de la France sur l'accord UE-Mercosur, "un cocktail explosif dont personne ne mesure l'impact" pour l'élue LFI, qui regrette que le gouvernement et Emmanuel Macron n'entrent pas dans "un rapport de force" pour davantage s'y opposer.
L'UE et le Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay, Paraguay et Bolivie) négocient depuis plus de vingt ans un accord visant à créer une zone de libre-échange, en supprimant la majorité des droits de douane entre les deux zones au sein d'un espace de plus de 700 millions de consommateurs.
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La France isolée "sur la scène européenne"
Un accord politique avait été conclu en 2019, mais l'opposition de la France, notamment, a bloqué l'adoption définitive, opposition qui s'est renforcée avec la crise agricole qui sévit en Europe. Mais, la France "est en train de s'isoler sur la scène européenne", note Manon Aubry, ancienne tête de liste de LFI aux élections européennes. "Si elle tient bon, il faudra qu'elle utilise les outils du rapport de force, mais ce n'est pas la direction qu'elle prend pour l'instant. Si elle cède, elle va se prendre de plein fouet la colère agricole et ça donnera à voir toute l'hypocrisie de Macron sur le libre-échange", dit-elle, rappelant le contexte de "mobilisation du milieu agricole" qui laisse, selon elle, présager d'un "cocktail explosif dont personne ne mesure l'impact".
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Des négociations en cours
La France espère obtenir une minorité de blocage au sein de l'UE pour s'opposer à l'adoption européenne du texte. "Il faut donc qu'ils aient avec eux 45% des Etats qui représentent 35% de la population européenne", selon la présidente du groupe de la Gauche au Parlement européen.
"L'Autriche, les Pays-Bas ont émis des réserves. Mais même avec la France, on serait loin de la minorité de blocage", regrette l'élue, opposante de longue date aux accords de libre-échange. L'Allemagne espère une conclusion rapide des négociations sur cet accord, et le chancelier Olaf Scholz rappelait début octobre que des pays comme l'Italie et l'Espagne y sont favorables.
En revanche, selon Manon Aubry, "une écrasante majorité des parlementaires français sont opposés" à ce traité avec le Mercosur, "parfois à rebrousse-poil de leur groupe d'ailleurs". "La France pourrait en faire un casus belli, elle a les leviers pour imposer un rapport de force", estime-t-elle encore, regrettant notamment que le président Emmanuel Macron ne mette pas la pression sur la Pologne.
"Depuis que ce texte est négocié, nous les Parlementaires européens n'y avons jamais eu accès", regrette-t-elle enfin, expliquant que son groupe allait "mener une bataille sur la transparence" autour de cette question à Bruxelles.