A peine désigné à l’issue d’une primaire, le candidat écologiste s’engage dans une autre bataille, au moins aussi ardue, pour parvenir à s’aligner à la présidentielle.
L’euphorie sera sans doute de courte durée pour Yannick Jadot. A peine élu candidat des écologistes à l’élection présidentielle lundi soir, au moment de la proclamation des résultats de la primaire écologiste, l’eurodéputé doit se lancer dans un autre combat. Car malgré sa désignation, il n’est pas sûr du tout de parvenir à remplir les conditions pour être effectivement candidat en avril 2017. Et juste derrière, il y aura les législatives. Les étapes s’annoncent donc longues et difficiles.
- Première étape : les 500 signatures
En théorie, 47.000 personnes, les maires, les conseillers régionaux et départementaux, les parlementaires, peuvent parrainer un candidat à la présidentielle. Pour Yannick Jadot, en trouver 500 relève pourtant bel et bien de la gageure. D’abord parce que depuis 2012, le nombre d’élus écologistes a fondu comme neige au soleil. Les élections régionales et départementales ont été catastrophiques pour la gauche en général et pour Europe Ecologie-Les Verts en particulier. Pour l’heure, le candidat écologiste annonce 200 paraphes, ce qui correspond peu ou prou au nombre d’élus dans les régions et les départements. Il reste donc du chemin à parcourir.
Deux facteurs compliquent cette quête des signatures : les divisions d’abord, puisque certaines personnalités, dont Jean-Vincent Placé, François de Rugy ou Barbara Pompili, ont quitté le navire vert pour créer leur propre formation, immanquablement suivis par des élus locaux. Ensuite, les nouvelles règles en matière de parrainage, puisque le Conseil constitutionnel a annoncé qu’il publierait, en temps réel, les noms des signataires, qui devront en sus déposer eux-mêmes leur parrainage auprès des Sages. Plus compliqué, donc, et moins confidentiel. De quoi décourager certaines bonnes volontés. Enfin, ultime précision : les 500 signatures doivent provenir d’élus d’au moins 30 départements différents. Il faudra donc sillonner une bonne partie de la France.
- Deuxième étape : Trouver des fonds
C’est l’une des autres conséquences des défaites électorales subies par les écologistes. Car qui dit moins d’élus dit moins de financements, qu’ils soient publics ou venus de ces élus. Sans compter l’hémorragie d’adhérents et donc de cotisations. Aujourd’hui, le parti écologiste est exsangue. Il a été contraint de vendre son siège parisien et s’installera la semaine prochaine à Montreuil, en banlieue parisienne. Et alors qu’il n’exclut pas des licenciements au sein de son personnel, difficile d’imaginer que le parti puisse sortir de l’argent pour une campagne présidentielle, par essence extrêmement onéreuse.
" Si chacun donne un euro, on est les rois du pétrole. Enfin, du photovoltaïque "
D’autant qu’il y a peu de chances de voir Yannick Jadot, s’il parvient à être candidat, dépasser les fameux 5% des suffrages, qui permettent un remboursement des frais de campagne engagés, à hauteur de 50% du plafond autorisé. Soit environ 8 millions d’euros. Le parti peut plus probablement compter sur un maximum de 800.000 euros environ, réservé aux petits candidats qui n’ont pas dépassé le seuil fatidique.
Pour trouver des fonds, Yannick Jadot pourrait, selon France Info, se tourner vers le crowfunding, pratique très en vogue consistant à appeler aux dons sur internet. L’eurodéputé s’appuie sur le succès de la vidéo de son discours dans lequel il pourfend le CETA au Parlement européen, qui compte 3,5 millions de vues. "Si chacun donne un euro, on est les rois du pétrole. Enfin, du photovoltaïque", glisse-t-il avec humour, selon la radio publique.
- Etape 3 : ne pas sombrer aux législatives
De par son statut de candidat à la présidentielle, Yannick Jadot est désormais le nouvel homme fort d’Europe Ecologie-Les Verts. A charge donc pour lui de reconstruire les fondations d’une formation en ruine. Cela passe, immanquablement, par des accords avec des partenaires. Pour au moins avoir quelques députés en 2017, condition nécessaire, sinon suffisante, pour continuer à exister dans la vie politique du pays. Dans cette perspective, un rapprochement avec le Parti socialiste semble indispensable. Sauf que l’eurodéputé s’est montré plutôt inflexible sur le sujet pendant la campagne des primaires. "Je n'ai jamais passé d'accord avec les socialistes, aucun de mes mandats n'a un lien avec les socialistes, je n'ai jamais bidouillé des trucs avec les socialistes, je ne vais pas commencer maintenant", écrivait-il dans une lettre adressée aux membres du Conseil fédéral, rappelle Franceinfo.
Un dialogue avec les socialistes sera d’autant plus difficile si c’est François Hollande qui est désigné au terme de la primaire, en janvier 2017. La rupture avec le président de la République est consommée au sein du parti écologiste, comme le prouve l’élimination de Cécile Duflot dès le premier tour. Yannick Jadot a donc tout à gagner en cas de victoire d’Arnaud Montebourg, par exemple. Sinon, EELV aura le choix soit de partir seul au front, soit de s’allier avec la France insoumise de Jean-Luc Mélenchon. Mais d’une part, des victoires aux législatives n’auraient rien d’évident. Et d’autre part, l’homme n’est pas des plus partageurs.