"Je sais encore comment gagner un congrès", confiait François Hollande en novembre dernier. Six mois plus tard, le pari est remporté. La motion portée par le premier secrétaire du Parti socialiste, Jean-Christophe Cambadélis, et soutenue par l'exécutif a recueilli plus de 60% des suffrages des militants jeudi. Pas un raz-de-marée, surtout au regard de la participation (autour de 55%), mais un score rassurant pour le chef de l'Etat. En marge d'un sommet européen à Riga, vendredi, François Hollande a d'ailleurs affiché sa satisfaction. "Tout ce qui peut apporter de la stabilité, de la cohérence et de la visibilité est bon pour l'action que je mène aujourd'hui pour la France", a-t-il salué.
Il peut poursuivre sa politique. En votant majoritairement pour la motion Cambadélis, les militants socialistes ont donné leur feu vert au programme formulé dans ce texte signé par Manuel Valls et la quasi-totalité du gouvernement. Un texte qui illustre à merveille l'art de la synthèse cher à François Hollande. La motion A prône en effet une poursuite des réformes engagées depuis 2012 tout en proposant des "évolutions", comme une réforme fiscale ou une réorientation vers l'investissement de 15 milliards d'euros prévu par le "pacte de responsabilité".
Cela ne va pas sans ambiguïté. Ainsi, le ministre des Finances Michel Sapin, qui a pourtant signé la motion, a repoussé dimanche toute idée de big bang fiscal. Autre contradiction : le texte s'oppose "à une nouvelle extension du travail du dimanche", alors même que la loi Macron s'apprête à assouplir la législation en la matière. Un flou savamment entretenu, qui permet à François Hollande de donner des gages à l'aile gauche du PS.
"Les adhérents socialistes n'ont pas voulu désavouer leur président, ça ne veut pas dire qu'ils sont d'accord sur tout", commente un proche du chef de l'Etat. Pour autant, "la politique de la France ne peut pas se résumer à une motion", prévient-il. Manière de dire que François Hollande estime avoir les coudées franches pour le reste de son mandat.
Il calme les frondeurs. Au terme de délicates négociations, François Hollande est parvenu à rallier Martine Aubry à sa motion dès avril. Le président gardait toutefois une légère inquiétude avant le vote : et si, malgré tout, Jean-Christophe Cambadélis n'obtenait pas la majorité ? L'aile gauche du PS aurait alors eu beau jeu de continuer à réclamer un changement de cap. Si les frondeurs se disent satisfait de leur score - entre 28 et 30% -, ils reconnaissent que leur rôle ne pourra plus être le même. Christian Paul, premier signataire de la motion des frondeurs, veut ainsi "tourner la page de ce que les médias ont appelé la fronde parlementaire", a-t-il déclaré sur RTL, pour mener un débat interne au parti.
Il conserve les postes stratégiques du PS. Les scores obtenus par chaque motion détermineront les places au sein des instances nationales du PS et dans les fédérations locales. Les soutiens de la ligne Hollande seront donc reconduits aux postes stratégiques. Même si les fauteuils devront forcément être partagés avec les partisans de Martine Aubry. Par ailleurs, Jean-Christophe Cambadélis, fidèle démineur de l'exécutif, est assuré d'être reconduit au poste de premier secrétaire. Le député de Paris avait succédé à Harlem Désir à la tête de la rue de Solferino l'an dernier, mais sa désignation n'avait pas reçu l'aval des militants. Ce sera chose faite jeudi prochain, lors de l'élection du premier secrétaire.
Il franchit une étape vers 2017. Ce congrès de mi-quinquennat, c'est l'une des dernières haies avant l'élection présidentielle de 2017. En s'assurant d'être majoritaire dans son propre parti, François Hollande passe l'obstacle. Son défi est désormais d'utiliser ce socle pour élargir ses soutiens. Le président rêve d'une gauche unie derrière lui dès le premier tour de la présidentielle. Crucial, alors que le Front national compte bien empêcher un second tour droite-gauche. Rallier le PS n'a pas été sans mal. L'équation s'annonce encore plus compliquée s'agissant des écologistes et des communistes.
>> L'analyse d'Alexandre Kara, éditorialiste politique à Europe 1 :