L'Assemblée nationale a rejeté lundi soir tous les amendements visant à abroger ou à encadrer davantage les pouvoirs exceptionnels du président de la République, adoptant seulement la correction d'une faute d'accord dans la Constitution ... datant d'il y a 60 ans.
L'article 16 dans le viseur de la gauche. Plusieurs groupes notamment de gauche ont plaidé pour supprimer l'article 16 de la Constitution autorisant le chef de l'Etat à prendre "toute mesure exigée par les circonstances", "lorsque les institutions de la République, l'indépendance de la Nation, l'intégrité de son territoire ou l'exécution de ses engagements internationaux sont menacés d'une manière grave et immédiate et que le fonctionnement régulier des pouvoirs publics constitutionnels est interrompu".
Les pleins pouvoirs, une mesure encadrée. La révision constitutionnelle de 2008 a prévu un contrôle, peu contraignant, de l'application : au bout de 60 jours (ou 30 jours s'il est saisi par des parlementaires), le Conseil constitutionnel indique, dans un avis public, si à son sens les circonstances exceptionnelle ayant entraîné le recours à l'article 16 sont toujours réunies. L'article n'a été mis en oeuvre qu'une fois, lors du putsch des généraux en 1961. Les pleins pouvoirs au général De Gaulle restèrent en vigueur cinq mois.
Cet article "ouvre la possibilité au Président de la République de mettre en place un régime de concentration totale des pouvoirs", aux yeux des socialistes. "Dans un État démocratique comme la France, il n'est pas nécessaire qu'une disposition constitutionnelle limite le fonctionnement des institutions", pour les communistes. La ministre de la Justice, Nicole Belloubet, a défendu, comme la présidente de la commission des Lois Yael Braun-Pivet, cet article pour "des circonstances très exceptionnelles", à l'utilisation "très encadrée". Pour le LR Marc Le Fur, "il faut absolument garder l'article 16, l'Histoire est tragique".
"Menacées" remplace "menacés". Le seul amendement sur cet article 16 de la Constitution voté par l'Assemblée nationale a corrigé une faute, "menacées", et non "menacés", à l'initiative des UDI-Agir. "Faut-il la corriger par amour de l'orthographe ou la conserver par amour de la Constitution telle que rédigée en 1958 ? Je vous laisse juges", a lâché la présidente de la commission des Lois Yaël Braun-Pivet. Après avoir, dans un premier temps, émis un avis défavorable pour "garder le texte originel dans son intégrité" et parce que la correction est "faite par les éditeurs", la ministre s'en est remise à la sagesse des députés.