Ce vendredi, l'éditorialiste politique Nicolas Beytout s'intéresse aux candidats de gauche, en grande difficulté dans cette campagne électorale. Pour l'heure, et selon le dernier pointage du nombre des parrainages, trois candidats sont en mauvaise posture, dont Philippe Poutou et Jean-Luc Mélenchon. Mais la situation la plus préoccupante, et de loin, est celle de Christiane Taubira à qui il manque encore 414 signatures.
En deux semaines, atteindre le seuil des 500 devient en effet quasiment impossible. En fait, tout a basculé pour elle lorsque le Parti Radical de Gauche a décidé de la lâcher. Le PRG, c’est ce petit parti qui l’avait encouragée à se présenter aux suffrages de la Primaire populaire, persuadé qu’elle l’emporterait et que, de là, naîtrait un irrésistible courant ascensionnel. Raté, au mieux, ça a été la naissance d’un irrésistible moment de gêne devant l’accumulation de ses interventions pleines d’un vide camouflé sous une prétention poétique.
Elle n’avait rien préparé, rien construit, rien partagé. En début de semaine, le PRG a donc renoncé à la soutenir, et par conséquent à lui accorder les 300 parrainages que ce parti affirmait pouvoir mobiliser. Et comme les catastrophes n’arrivent jamais seules, la Primaire populaire a, dans la foulée, montré de plus en plus de réticences à se ranger derrière celle qui avait pourtant remporté leur étrange concours de beauté. Sauf que le vainqueur s’engageait à unifier la gauche (c’était même la justification première de la Primaire populaire). Ce que Christiane Taubira n’a pas suffisamment fait. Et là encore, ce sont 200 parrainages environ qui resteront dans le frigo de la Primaire.
Ça n’empêchera pas Christiane Taubira de se maintenir…
Effectivement, elle le dit et le répète, elle ira jusqu’au bout. C’est bizarre, cette façon qu’a la gauche de se prétendre morale à tout bout de champ et d’être incapable de respecter ses propres engagements. Car, au moment de dévoiler son ambition élyséenne, il y a quelques semaines, Christiane Taubira avait affirmé à plusieurs reprises, et de la façon la plus nette, qu’elle ne serait pas une candidate de plus, et qu’elle ne participerait pas à la division de la gauche. Il faudra donc le couperet des parrainages manquants pour qu’elle soit contrainte de tenir parole.
Mais à gauche, elle n’est pas la seule à se maintenir malgré des scores historiquement bas. Anne Hidalgo n’est pas mieux lotie, c’est vrai. Mais elle a ses parrainages, elle. Formellement, elle peut donc continuer. Et cela, malgré plusieurs lâchages récents. D’abord celui de Place publique, ce petit mouvement lancé par Raphaël Glucksmann à l’occasion des élections européenne -il y a trois ans. Le PS avait même offert la tête de liste à ce nouveau venu en politique, qui sera élu député européen et qui, en juste renvoi d’ascenseur, soutiendra l’année suivante Anne Hidalgo pour sa réélection à la mairie de Paris.
>> LIRE AUSSI - Présidentielle : la campagne de Christiane Taubira en péril après le "retrait" du PRG
Mais terminé, Place publique et le PS, c’est fini. Je vous l’accorde, ça n’aura pas beaucoup de conséquences, Raphaël Glucksmann étant plus connu des contrôleurs du TGV Paris-Strasbourg, là où siège le Parlement européen, qu’il ne l’est des Français. Mais ce lâchage est le signe d’un grand désarroi à gauche, puisque ce mouvement ne soutiendra aucun candidat à l’Élysée.
Et puis, il y a Ségolène Royal
Reste un lâchage (mais oui, encore un) celui de Ségolène Royal envers Anne Hidalgo. L’ex-candidate à l’Élysée de 2007 qui avait échoué aux dernières sénatoriales faute d’un soutien du PS, tient sa vengeance puisqu’elle a carrément conseillé à Anne Hidalgo de retirer sa candidature, expliquant qu’il fallait désormais voter Mélenchon, parce qu’il est le mieux placé, parce qu’il est le plus solide et que sa campagne est professionnelle. Et peu importe, semble-t-il, que Ségolène Royal ne partage à peu près aucun des combats du leader de La France insoumise (elle est à droite du PS, il est loin sur sa gauche).
>> LIRE AUSSI - Présidentielle : Ségolène Royal estime que le «vote utile à gauche, c'est Mélenchon»
Peu importe surtout que, il y a 15 ans, Ségolène Royal soit ressortie en lambeaux de sa campagne présidentielle, face à Nicolas Sarkozy, à cause des grands éléphants du PS qui l’avaient soutenue comme la corde soutient le pendu. Faire à Anne Hidalgo ce qu’elle a tant détesté qu’on lui fasse, c’est dire, là encore, la profondeur de la crise dans laquelle la gauche tout entière est plongée.