Présidentielle : «Ce qui est étonnant, c'est la grande satisfaction des vaincus»

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Gauthier Delomez , modifié à

Au lendemain de la réélection d'Emmanuel Macron, le politologue Jérôme Jaffré et le sociologue Michel Wieviorka étaient les invités d'"Europe Matin" pour analyser le second tour de la présidentielle. Les deux experts ont abordé les réactions de Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon, qui se sont tous les deux tournés vers les législatives dès l'annonce des résultats.

Est-ce une victoire à la Pyrrhus pour Emmanuel Macron ? Le président sortant a été réélu dimanche avec 58% des voix, ce qui fait du leader de LREM le premier président à être reconduit pour un second quinquennat. Mais pour Jérôme Jaffré, politologue, et Michel Wieviorka, sociologue, les deux grands vaincus de la présidentielle , Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon , pourraient tirer le plus grand parti de ce résultat. "Ce qui est étonnant dans ces deux tours de scrutin, c'est la grande satisfaction des vaincus que j'ai rarement vue à ce point", estime Jérôme Jaffré, également chercheur associé au Cevipof, au micro de Sonia Mabrouk.

Le politologue revient d'abord sur la réaction du candidat de La France insoumise, "très satisfait au soir du premier tour, de l'exploit réalisé, de ses 22% (obtenus), de cette captation de l'électorat de gauche autour et derrière lui. Jean-Luc Mélenchon avait un grand moment de bonheur qu'on n'a pas retrouvé dans son intervention du second tour", affirme-t-il dans Europe Matin lundi.

Le changement de regard des Français sur Marine Le Pen

Jérôme Jaffré ajoute que cette satisfaction est aussi présente du côté de Marine Le Pen. "D'abord, parce qu'elle songeait sans doute aux 18% de son père en 2002, à ses 34% en 2017 devenus presque 42% au soir de 2022", énumère-t-il, soulignant également une meilleure prestation lors du débat de l'entre-deux tours qu'il y a cinq ans. "Sans doute songeait-elle aussi qu'elle n'aurait pas à porter le poids de tous les problèmes du pays dans les prochaines années, et qu'elle avait accompli son destin en portant une candidature jusqu'au bout", évoque le politologue.

Pour lui, "l'enseignement très remarquable de cette campagne présidentielle" pour la candidate du Rassemblement national constitue sa "certaine réussite dans la relation avec les Français, le changement de regard des Français sur Marine Le Pen qu'on a pu observer tout au long de la campagne et qui fait que c'est une défaite qui n'est pas si douloureuse que cela."

Comment Mélenchon peut capter l'électorat de gauche

"Si pour eux, ce n'est pas vraiment une victoire, pour Emmanuel Macron non plus", enchérit le sociologue Michel Wieviorka, auteur du livre Alors Macron, Heureux ?, qui s'interroge sur l'évolution "des deux logiques d'opposition" entre Rassemblement national et France insoumise. "Marine Le Pen a géré aussi l'obstacle Éric Zemmour, et c'est pour ça qu'elle peut être contente. Elle s'en est tirée de façon hallucinante", appuie-t-il au micro de Sonia Mabrouk.

"C'est presque un problème symétrique" pour Jean-Luc Mélenchon, poursuit Michel Wieviorka. "Si Mélenchon veut vraiment devenir l'incarnation de l'opposition de gauche, il va lui falloir non seulement étrangler le peu qui reste du Parti socialiste et des communistes, mais surtout capter leur électorat, donc mettre peut-être un peu d'eau dans son vin", analyse le sociologue.