Depuis la proclamation des résultats de la Primaire populaire, tout le monde a regagné son couloir, sans aucune intention de faire l’unité. Et au petit jeu du chacun pour soi, c’est probablement Anne Hidalgo qui a perdu le plus dans cette élection. Son attitude ambigüe et changeante, d’abord hostile à la Primaire, puis favorable, puis à nouveau hostile, fait qu’elle n’a pas pu dissocier son image de cette consultation et de ses résultats. À l’inverse, Jean-Luc Mélenchon et Yannick Jadot ont toujours refusé d’être associés de près ou de loin à cette initiative militante. Résultat, bien que devancés tous les deux par Christiane Taubira, ils ont installé l’idée que cette affaire n’était pas la leur, ce qui fait que, même battus, ils ne sont pas perdants.
Tout reprend comme avant…
Yannick Jadot pousse son programme écolo, jonglant constamment avec les différentes tendances de son univers politique. Ce n’est pas rien. Quant à Jean-Luc Mélenchon, il enchaîne les émissions politiques, ou pseudo-politiques, et pas toujours pour se montrer sous son meilleur jour...
Je pense à cette émission de la fin de semaine dernière, "Face à Baba". Le leader de La France Insoumise se retrouvait donc dans un show dirigé par un animateur qui aime faire le buzz, et qui ne dédaigne pas les clashs. Au début, tout se passe vraiment bien, Jean-Luc Mélenchon est décontracté, plaisante avec Cyril Hanouna.
Puis vient Eric Zemmour pour une vingtaine de minutes de débat. C’était leur deuxième confrontation à la télé, c’est dire qu’ils doivent aimer ça, d’ailleurs elle durera plus d’une heure.
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Sauf que cette fois, sur le plan des idées, cette confrontation a été totalement inutile. Eric Zemmour n’a rien développé de nouveau, il s’est laissé enfermer dans ce qui fait désormais office chez lui de classique. Mais en face, c’est vite monté dans les tours. Et Jean-Luc Mélenchon qui n’aime rien tant que de donner des leçons de démocratie et de proclamer son respect du débat, s’est en réalité montré très agressif, méprisant, aussi, parfois.
Quand deux radicalités différentes se cognent, place aux étincelles
Mais le danger est que les emportements finissent par révéler une facette problématique d’une personnalité. C’est ce qui s’est produit un peu plus tard dans l’émission. Le candidat de La France insoumise s’est en effet retrouvé dans un face-à-face avec un policier de la Bac 93, département difficile, s’il en est, sur le plan de la sécurité.
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On le sait, Jean-Luc Mélenchon s’est résolument placé du côté des victimes de bavures policières, et du côté des populations victimes de contrôle au faciès, et du côté de tout ce que la France compte de minorités supposées par principe être opprimées.
Et là, tout a dérapé : face au policier, Jean-Luc Mélenchon a parlé de plus en plus fort, il a crié "si je suis élu, vous m’obéirez", il a tempêté des "ça suffit, vous avez compris, ça suffit", il a menacé "la police est aux ordres de la Nation, aux ordres, c’est pas elle qui en donne", avant de pointer un doigt vengeur et de promettre en hurlant que les policiers "ayant des comportements racistes personnels seront expulsés". Incroyable moment, qui rappelait un autre épisode peu glorieux face à des policiers.
"La République c’est moi"
Ce moment lui avait coûté cher, en termes d’image, et de présidentialité. Tous les sondeurs s’accordent à penser que, depuis cette séquence, son fameux "la République c'est moi" et la bousculade provoquée lors d'une perquisition à son domicile, une majorité de Français a regardé différemment Jean-Luc Mélenchon, lui trouvant une part inquiétante, alors que pour être Président, mieux vaut maîtriser ses nerfs.
C’est ce trait de caractère qui est ressorti chez Hanouna. Il l’avait plutôt dominé jusque-là. À 69 jours du premier tour de scrutin, Jean-Luc Mélenchon a promis de ne plus se faire prendre dans ce genre d’émission, mais une partie du chemin est à refaire.