Comment relancer sa campagne à moins de trois mois du premier tour de l'élection présidentielle ? C'est la question que se posent Anne Hidalgo et ses équipes, qui peinent à décoller dans les sondages. Jeudi, la maire de Paris, candidate du Parti socialiste, a dévoilé son programme muni de 70 propositions. L'éditorialiste Nicolas Beytout y voit une candidature qui n'arrive pas à rassembler, et à se distinguer à gauche.
La présentation du programme d'Anne Hidalgo jeudi devait être une occasion, une nouvelle occasion, de relancer la campagne de la candidate officielle du Parti socialiste. Cela devait être un moment médiatique et l’amorce de nouveaux débats. Pour tout dire, ça devait être la dernière chance pour la maire de Paris de sortir de la mélasse dans laquelle sa campagne s’enfonce depuis septembre dernier et, enfin, de faire parler de ses idées, de ses propositions.
Son camp plus que jamais divisé
Cela devait, car il ne s’est pas passé grand-chose. D’abord parce que Anne Hidalgo s’est obstinée à vouloir présenter son programme alors que les médias avaient autre chose à se mettre sous la dent, avec la grève dans l’éducation. Quand on veut faire un coup médiatique, on essaye de ne pas être recouvert par une autre actu plus forte. D’autant que les profs sont le vivier dans lequel le PS recrute traditionnellement en masse, et c’est même à eux qu’elle avait fait sa première promesse : le doublement de leur salaire, une promesse abandonnée depuis.
Résultat : Anne Hidalgo s’est faite huer, c'est le premier ratage. L’autre est plus préoccupant : au moment où Anne Hidalgo déroulait ses propositions, on apprenait que les instances du Parti socialiste étaient désormais profondément divisées sur sa candidature. Il faut dire que la candidate a fait ce qu’il fallait pour désorienter tout son monde : son ralliement surprise à une primaire populaire qu’elle avait toujours refusée, primaire qu’elle rejette désormais, donne le tournis à ses plus fervents défenseurs.
La promesse de doubler le salaire des profs abandonnée
Il s'agit d'une "Attitude suicidaire", disait jeudi à Europe 1 un membre de la direction du PS, qui continue à parier qu’elle ne tiendra pas jusqu’au bout. Le plus savoureux, dans tout ça, c’est qu’Anne Hidalgo a choisi comme slogan de campagne : "Réunir la France". Peut-être le mieux serait de commencer par réunir ses soutiens.
Anne Hidalgo a laissé tomber sa proposition-phare de doublement des salaires des enseignants pour ne plus retenir que la promesse de porter leur rémunération "au niveau de celle des cadres". C’est assez vague. Pour le reste, on a droit à une série de propositions classiques de gauche, c’est-à-dire largement tournées vers la dépense publique et les impôts. Sur ses 70 propositions, on en compte une vingtaine qui consiste en la distribution de plus d’argent public ou la création d’impôts, de taxes ou de contraintes nouvelles.
Une candidature sensiblement proche des Verts
Tout cela en promettant que les Européens n’ont qu’à bien se tenir, parce que le pacte de stabilité et de croissance européen sera remplacé par un pacte "de progrès ". Le surendettement, c’est donc censé être le progrès. Aucune originalité, en somme, aucune vision qui ait la moindre chance de redonner un sens à la social-démocratie.
L'écologie est une partie importante de son programme. C’est, selon elle, "le combat du siècle". Mais sur ce sujet, rien ne la distingue vraiment des propositions des écologistes, y compris sur le nucléaire puisque non seulement elle veut arrêter toute nouvelle construction de centrale (grande ou petite), mais elle veut arriver à 100% d’énergie renouvelable "aussi rapidement que possible".
C’est vague, mais cela peut être raccord avec les Verts, comme peuvent l’être ses propositions de référendum citoyen, de reconnaissance du vote blanc ou de droit de vote à 16 ans. Tellement raccord qu’à force, on va finir par se demander à quoi pourrait bien servir cette candidature, à la fois si contestée au sein même du Parti socialiste, et si peu distinctive de l’offre pléthorique que la gauche, réduite à sa plus simple expression, continue à aligner dans la course à l’Élysée.