"Candidate qualifiée, 48 ans, recherche d'urgence réserve de voix." Telle pourrait être la petite annonce déposée par Marine Le Pen lundi matin. En lice pour le second tour de l'élection, la candidate frontiste a réalisé dimanche sa plus haute performance, tout scrutin confondu, engrangeant 21,4% des suffrages exprimés. L'équivalent de 7,6 millions de voix. "Un résultat historique", s'est félicitée dimanche la présidente du FN devant ses partisans réunis à Hénin-Beaumont. Et qui ouvre officiellement la chasse au report de voix. Désormais crédité à 38% d'intention de vote au second tour - contre 62% pour son rival - Marine Le Pen doit mobiliser au-delà de sa base pour espérer créer la surprise le 7 mai. Europe 1 fait le tour des réserves éventuelles du Front national.
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L'électeur Fillon pas si acquis au FN
Les déçus du candidat de droite constituent aujourd'hui la meilleure ressource pour la candidate FN. Après l'élimination de leur champion, un tiers des troupes de François Fillon (33%) pourrait se ranger derrière Marine Le Pen, selon un sondage réalisé dimanche soir après les résultats par l'institut Ipsos. Pour autant, peut-on imaginer, à l'instar de David Rachline sur notre antenne, que les électeurs de François Fillon, dans leur majorité, " refuseront le projet mondialiste d’Emmanuel Macron" ? Pas si sûr, si l'on en croit cette même étude d'opinion. Un peu moins de 50% de l'électorat de droite pourrait se reporter sur le candidat d'En Marche.
Une tendance préoccupante pour le parti frontiste, alors que les appels des ténors LR se succèdent depuis dimanche soir pour faire "barrage" au FN. Sans non plus être insurmontable. Près de 20% des électeurs de François Fillon, "non exprimés" dans cette enquête, restent à conquérir. Quoi qu'il en soit, "l'électorat de François Fillon constitue la plus grosse réserve de voix", indique pour Europe 1 Edouard Lecerf, directeur politique et opinion de Kantar Sofres.
Les voix de Dupont-Aignan draguées à raison
Autre cible de choix du FN : les électeurs de Nicolas Dupont-Aignan (4,7%), lesquels devraient recevoir de nombreux appels du pied pendant l'entre-deux-tours. Invité de France 2 lundi matin, Florian Philippot s'y est en tout cas largement employé alors que le candidat de Debout la France n'a pas encore donné de consigne de vote. "Oui, on tend la main, on tend la main à tous les patriotes. Nicolas Dupont-Aignan, il n'y a quasiment rien qui le sépare de nous", a assuré le bras droit de Marine Le Pen.
Une drague en bonne et due forme dont les frontistes auraient tort de se priver. Selon la dernière vague de l'Enquête électorale d'Ipsos pour le Cevipof, les hypothèses de report de voix des électeurs de Nicolas Dupont-Aignan vers Marine Le Pen étaient de 46% au premier tour, contre 34% pour Emmanuel Macron. "Reste à savoir si le duel désormais acté entre les deux finalistes changerait ce scénario", prévient Edouard Lecerf. A ce jour, l'étude de la porosité électorale entre les deux candidats n'a pas encore été actualisée.
Un report "marginal" chez les "insoumis"
Alors que Jean-Luc Mélenchon (19,6%) a annoncé s'en remettre à ses militants pour apporter son soutien à l'un des finalistes, les partisans de la France insoumise forment un bas de laine électorale convoité par le Front national. Les cadres frontistes ne s'y trompent d'ailleurs pas, redoublant de clin d'oeil envers cet électorat. Quitte à opérer quelques virages à 180 degrés, à l'image de Steeve Briois tendant la main aux participants du mouvement Nuit Debout... Après l'avoir copieusement critiqué en 2016.
Des effets de manche qui pourraient ne pas être payants. Selon les reports de voix potentiels observés par l'institut Ipsos dimanche après publication des résultats, seul 9% des électeurs de Jean-Luc Mélenchon pourraient glisser un bulletin "Le Pen" le 7 mai, contre 62% pour Emmanuel Macron. Une analyse confirmée à ce jour par Edouard Lecerf. "Le risque de report est très marginal", observe le sondeur.
Un mot d'ordre : "agréger tous les anti-Macron"
Face aux doutes pour Marine Le Pen de parvenir à crever le "plafond de verre" au second tour, reste une certitude, juge Edouard Lecerf. Pour tenter de s'immiscer sur la première marche du podium, la "fusion des droites" (des Républicains à Debout la France) ne pourra être suffisante. "Il faudrait qu'elle réussisse à dépasser son socle agréger tous les anti-Macron derrière son nom", analyse le directeur politique et opinion de Kantar Sofres. Une tâche colossale. "Si le taux de participation reste le même, il lui faudra mobiliser près de 18 millions d'électeurs", rappelle Edouard Lecerf. Sauf à voir l'abstention grimper en flèche...