C’est un simple chiffre. Mais il est le signe que quelque chose a changé dans la politique française. Que le bipartisme - plus rarement le tripartisme - à l’œuvre depuis plus de cinq décennies dans l’Hexagone, a peut-être vécu pour laisser place à un inédit quadripartisme. Qu’il va désormais falloir s’habituer à des élections plus indécises, et aussi, par voie de conséquence, à une manière différente de gouverner, avec des alliances changeantes. Ce chiffre, c’est l’écart entre Emmanuel Macron, le candidat arrivé en tête dimanche au premier tour de l’élection présidentielle, et le quatrième, Jean-Luc Mélenchon. 4,23% (selon des chiffres quasi-définitifs), une amplitude minuscule, la plus faible des élections présidentielles de la 5ème République, soit de 1965 à nos jours.
Il n’y a en fait qu’en 1995 que l’écart avait en dessous des dix points, entre Lionel Jospin à 23,30% des voix et Jean-Marie Le Pen, à 15%. Mais à l’époque, il y avait deux candidats membre du même parti, le RPR : Jacques Chirac et Edouard Balladur. Ensemble, les deux hommes avaient recueilli près de 40% des suffrages, ce qui aurait relégué le quatrième, Robert Hue (8,64% pour le PCF), à plus de 30 points. En 1981, l’écart entre le premier et le quatrième avait été inférieur à 13%, mais il y avait une division en deux blocs, la gauche, représentée par François Mitterrand et Georges Marchais, et la droite, avec Valéry Giscard d’Estaing et Jacques Chirac.
Enfin en 2002, le faible écart (13,04%), était plutôt dû à l’insigne faiblesse des candidats arrivés en tête (19,88% pour Jacques Chirac, 16,86% pour Jean-Marie Le Pen) qu’à la puissance du quatrième, François Bayrou, crédité de 6,84% des voix seulement. Impossible alors de parler de quadripartisme. L’élection de 2017 est bel et bien inédite par sa nature. Anomalie ponctuelle ou nouvelle donne ? L’avenir le dira.