C’était leur dernière chance de se démarquer, de glisser quelques tacles à leurs adversaires, de tenter en somme de faire la différence. Mais les sept candidats de la primaire de la droite n’ont pas vraiment saisi l’occasion jeudi soir, lors du troisième et dernier débat télévisé d’avant le premier tour. Les trois favoris, Alain Juppé, Nicolas Sarkozy et François Fillon, sont restés dans la retenue, et même Jean-François Copé s’est tenu à carreau. Seul Nathalie Kosciusko-Morizet a lancé quelques attaques envers… Bruno Le Maire. Et finalement, ce sont surtout les journalistes qui ont en pris pour leur grade.
Le temps fort : Sarkozy vs Pujadas. D’ailleurs, le principal temps fort du débat concerne un échange entre Nicolas Sarkozy et David Pujadas. Alors que le journaliste de France 2 demande à l’ancien président de commenter les déclarations de Ziad Takieddine, selon lesquelles il aurait reçu des valises de billets, la réponse a fusé, cinglante : "quelle indignité ! Nous sommes sur le service public. Vous n’avez pas honte de donner écho à un homme qui a fait de la prison ? Qui a été condamné à d’innombrables reprises pour diffamation et qui est un menteur ? Ce n’est pas l’idée que je me fais du service public. C’est une honte", a-t-il insisté.
Sarkozy interrogé sur Takkiedine : "une...par Europe1fr
Même fronde, plus posée tout de même, du côté de François Fillon, quand il s’est agi d’entamer la dernière partie du débat, qui devait donner lieu à des échanges directs entre les candidats. L’ancien Premier ministre a déploré cette vision de la "politique spectacle", alors même que la forme de l’émission avait été décidée en accord avec toutes les équipes de chaque candidat. Et c’est de fort mauvaise grâce, comme ses six concurrents par la suite, qu’il s’est plié à l’exercice. Ce qui promettait d’être le grand temps fort du débat s’est du coup révélé pour le moins décevant.
Une bataille NKM-Le Maire pour… la quatrième place. Finalement, les échanges les plus vigoureux sont venus de Nathalie Kosciusko-Morizet, qui a choisi de cibler en priorité Bruno Le Maire. D’abord sur la question du collège unique, dont le député de l’Eure veut la suppression. Ce sont "les mêmes qui viennent des plus grandes écoles qui poussent leurs enfants dans les filières les plus élitistes, et qui expliquent aujourd'hui qu'il faudrait supprimer le collège unique, c'est-à-dire en fait trier les enfants à l'âge de 11 ans", s’est agacée NKM. "Bruno, c'est pas vrai que tu aurais poussé tes enfants à voir à l'âge de 11 ans s'ils ont envie d'être mécanicien ou pâtissier. C'est faux, c'est simplement faux", a-t-elle insisté. Bruno Le Maire, normalien et énarque, n’a pas eu l’occasion de répondre directement.
Mais NKM ne l’a pas lâché, notamment quand le chantre du renouveau s’est pris les pieds dans le tapis sur son thème préféré, le renouvellement de la classe politique. Car Bruno Le Maire s’est contredit à la fin de son argumentaire. "Il faut beaucoup de maturité pour être président de la République. Et j’ai derrière moi plusieurs années de vie politique", a-t-il déclaré. "C’est le moment où on arrive à l’inverse de ce qu’on voulait démontrer", a persiflé NKM. Reste à savoir si ces saillies permettront à la députée de l’Essonne de grappiller des voix sur son adversaire, en perte de vitesse en cette fin de campagne.
Fillon le plus convaincant. Une dynamique inverse de celle de François Fillon, décidément bien parti pour créer la surprise. L’ancien Premier ministre est resté sur sa ligne, tout en sérieux et crédibilité. Et ça s’est avéré payant, selon un sondage Elabe. Car c’est bien lui qui s’est montré le plus convaincant, pour 33% des personnes interrogées. Il devance Alain Juppé (32%) et Nicolas Sarkozy (18%). Plus inquiétant encore pour les deux ex-grands favoris, François Fillon a réalisé la meilleure performance aussi selon les seuls sympathisants de la droite et du centre, qui sont 39% à l'avoir considéré comme le plus convaincant, tandis que 26% d'entre eux citent Nicolas Sarkozy et 25% Alain Juppé. Au final, au sortir de ce troisième débat, et contre toute attente, c’est le maire de Bordeaux qui paraît être en fâcheuse posture. Et le premier tour n’est que dans deux jours.