Primaire Les Républicains : gare à la dépense !

Pour Alain Juppé, Nicolas Sarkozy et François Fillon, comme pour les autres candidats à la primaire, une partie des sommes dépensées pour la primaire - en cas de victoire - sera prise en compte pour la campagne présidentielle.
Pour Alain Juppé, Nicolas Sarkozy et François Fillon, comme pour les autres candidats à la primaire, une partie des sommes dépensées pour la primaire - en cas de victoire - sera prise en compte pour la campagne présidentielle. © JEAN-SEBASTIEN EVRARD / AFP
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Les huit candidats à la primaire Les Républicains seront bientôt soumis à des règles internes. Mais c’est surtout le droit électoral qui doit les inciter à la prudence. 

Non, la campagne officielle de la primaire des Républicains n’a pas encore commencé. Cela fait plusieurs semaines pourtant que les candidats engagés, qui ne sont plus que huit depuis le dépôt officiel des parrainages nécessaires, ont commencé à batailler. Et ont donc commencé à engager des dépenses pour leur campagne. L’argent, c’est bien connu, est le nerf de la guerre, mais son utilisation est limitée. Par les Républicains eux-mêmes, mais aussi par la loi française. Les candidats à la candidature à la présidentielle ont donc tout intérêt à réfréner leurs ardeurs en termes de gros sous. Explications.

Du côté de la loi : les dépenses déjà prises en compte

La loi (n° 62-1292 du 6 novembre 1962, plusieurs fois modifiée, en l’occurrence) stipule clairement que les dépenses des candidats à la présidentielle sont prises en compte "pendant l'année précédant le premier jour du mois de l'élection", soit en l’espèce le 1er avril 2016. Toute dépense engagée depuis cette date est prise en compte. Il s’agit donc de ne pas trop dilapider d’argent, pour garder des réserves.

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Il faut faire attention, parce que ça chiffre vite

Et la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP, pour faire plus court), veille déjà au grain. "Le gagnant de la primaire, et seulement lui - la Commission considère que les perdants n’existent pas - aura pu avoir des dépenses qui auraient incité les électeurs à voter pour lui à l’élection présidentielle. Ces événements doivent apparaître pour tout ou partie dans les comptes de campagne de l’élection présidentielle", confirme Frédérique Dooghe, responsable de la communication de la CNCCFP. "Il faut faire attention, parce que ça chiffre vite", prévient-elle.

D’autant que l’instance n’hésite pas à rajouter des dépenses qui auraient été malencontreusement omises par le mandataire financier du candidat. "François Hollande en 2011, c’était 299.546 euros déclarés, auxquels on a rajouté 65.010 euros (voir encadré)", cite Frédérique Dooghe à titre d’exemple. Et la CNCCFP est déjà au travail. "La Commission n’a aucun rôle intrusif. On n’intervient donc pas, sauf si les candidats nous sollicitent. Mais on ne reste pas les bras croisés. On se renseigne, évidemment", assure la responsable. Voilà donc les candidat à la primaire de la droite prévenus : ils sont déjà sous surveillance.

Du côté des Républicains : un plafond pour "éviter des débordements"

Dans cette optique, en mai dernier, le bureau politique des Républicains a fixé le plafond des dépenses de campagne des candidats à la primaire à 1,5 million d’euros. C’est peu, diront certains. C’est beaucoup, pourtant, au regard du seul exercice démocratique comparable dans l’histoire, à savoir la primaire socialiste de 2011. A l’époque, François Hollande, candidat le plus dépensier, avait engagé environ 400.000 euros pour sa campagne (dont un peu plus de 320.000 finalement retenus (voir encadré). Ce sera une autre échelle, cette fois. "On a calculé par rapport au plafond autorisé par la loi, environ 16 millions (16,851 millions, ndlr) pour le premier tour, 22 millions (22,509 millions, ndlr) pour le second. En moyenne ramené sur un mois, ça faisait 1,5 million", explique Thierry Solère, président de la commission nationale d’organisation. "On a fixé ce plafond pour éviter les débordements", poursuit le député des Hauts-de-Seine.

Et le plafond décidé par Les Républicains ne règlera pas tout. Car il ne couvre que la période allant du 21 septembre au 27 novembre, date du second tour. En attendant ? "Ils font comme ils l’entendent", admet Thierry Solère. Au final, les sommes engagées pourraient être rondelettes. Alain Juppé avait par exemple annoncé avoir levé en avril plus de trois millions d’euros. S’il les dépense entièrement, il ne lui restera alors "seulement" qu'un peu plus de 13 millions d’euros pour sa campagne du premier tour. "Sur un plan purement budgétaire, c’est vrai que c’est un handicap", confesse le député des Hauts-de-Seine. Sauf à considérer que le vainqueur de la primaire sera le prochain président de la République. "Il a en tout cas vocation à l’être", répond Thierry Solère. Qui se défend pourtant de "tout excès de confiance".

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Si le vainqueur a dépassé le plafond, ça pourra avoir des conséquences

Surtout, la Haute autorité de la primaire a décidé que les comptes de campagne de chaque candidat seraient publiés et rendus publics, après avoir été déposés au plus tard le 20 décembre. Et là, il s’agira de ne pas avoir fauté. "Si le vainqueur a dépassé le plafond, il n’aura pas violé la loi française, mais il n’aura pas respecté les règles et ça pourra avoir des conséquences. Sur le plan médiatico-politique, d’abord. Mais aussi sur le plan juridique. C’est un contrat qui n’aura pas été respecté", prévient Thierry Solère. En clair, un candidat battu aura des recours si le vainqueur a outrepassé le fameux plafond. Sans compter que dans le contexte actuel, où il est beaucoup question de financement de campagne, notamment s’agissant de Nicolas Sarkozy, un non-respect des règles ferait tâche.

 

L'exemple de François Hollande

EN 2011, lors de la primaire du Parti socialiste, la CNCCFP ne s'est intéressée qu'à François Hollande, qui a remporté le scrutin et avait déclaré 299.546 euros pour la primaire. Dans sa décision du 19 décembre 2012, l'instance remarque que "certaines dépenses d'impressions et de réunions publiques, effectuées avant ou pendant la campagne de la 'primaire' et visant la promotion du candidat auprès des électeurs, relèvent du scrutin présidentiel mais n'ont pas été imputées au compte de campagne". En conséquence, la Commission a estimé qu'il convenait "d'intégrer une somme de 65.010 euros aux dépenses payées par les formations politiques".

Mais dans le même temps, la Commission a remarqué "une double comptabilisation" d'une somme de 38.546 euros, qu'elle a donc retranché des dépenses déclarées par François Hollande au titre de la primaire Au final, la CNCCFP a retenu à l'actuel président de la République, pour le compte de la primaire, la somme totale de 326.010 euros (299.546 + 65010 - 38.546).