La Primaire populaire, c’est cette initiative prise par quelques militants de gauche, il y a 18 mois, qui se sont dit que le seul moyen de gagner la présidentielle 2022 était d’avoir un candidat (et un seul) derrière lequel se rangeraient toutes les familles politiques situées à la gauche de La République en Marche. Un raisonnement qui se tient, qui a un précédent historique, le Programme commun qui avait permis à François Mitterrand d’être vainqueur en 1981.
Un vote électronique
Ni une ni deux, les initiateurs de la Primaire populaire ont créé une association, puis une deuxième pour lever des fonds. Ils ont créé un Bureau, en fait l’organe de direction de cette structure, et puis un Conseil d’orientation, et puis un Conseil des Partis, et puis un Département politique et partenariat, en somme ils ont tout fait comme les grands, même s’ils ne sont en réalité que 18 permanents. Bon, pas grave, ça fait sérieux, ça fait ronflant, et ça a permis d’aboutir à la rédaction d’un Socle commun (Socle avec une majuscule, c’est le document fondateur), qui comprend dix chapitres et des dizaines de propositions que le ou la vainqueur de la Primaire populaire doit s’engager à appliquer. Cette Primaire se déroule en fin de semaine prochaine, les inscriptions seront closes ce week-end.
Le vote sera électronique. C’est désormais un processus assez simple à mettre en place. Mais attention, ce ne sera pas un vote classique, mais un scrutin préférentiel. C’est-à-dire que chaque votant pourra classer ses choix par ordre de préférence, et tout ça sera placé sous le contrôle d’une Haute autorité de contrôle du vote (HACV), mais oui, désignée on ne sait comment et contrôlant on ne sait quoi. Et ce n’est pas la seule bizarrerie de cette Primaire populaire. Le plus étrange, c’est que les organisateurs se sont arrogé le droit de mettre sur les bulletins de vote les noms de candidats qui refusent obstinément et définitivement d’y figurer. Jean-Luc Mélenchon et Yannick Jadot rejettent la totalité de cette démarche, comme Anne Hidalgo qui s’est finalement, après deux ou trois revirements, alignée sur cette position.
Un programme très à gauche
Tant pis, disent les organisateurs, on maintient votre candidature. Grosse colère de La France Insoumise et des Verts, qui menacent et font pression, mais pour l’instant en vain. C’est incroyable, mais voilà : cette Primaire populaire va peut-être désigner un candidat qui ne veut pas défendre le programme de cette drôle de bande d’activistes. Un programme bien ancré à gauche, très à gauche, avec le retour à une agriculture paysanne, un revenu minimum pour tous les jeunes dès 18 ans, un quota d’eau, d’électricité et de gaz gratuit pour tous, le retour (au choix) à la retraite à 60 ans, ou aux 32 heures ou à la semaine de 4 jours, et puis bien sûr, une hausse de l’impôt sur le revenu pour les ménages aisés et le rétablissement de l’ISF ?
Oui, mais pas un médiocre petit ISF, non : un impôt sur la fortune multiplié par 3 ou 5 : jusqu’à 20 milliards d’euros. Effectivement, c’est clairement à gauche. Mais après tout, pourquoi est-ce que tous les candidats de gauche ne se prêtent pas au jeu ? Parce qu’ils ont déjà été désignés candidat officiel de leur parti (parfois déjà avec une primaire, comme Yannick Jadot), parce qu’ils ne veulent pas s’effacer derrière d’autres candidats et retirer leur candidature, parce qu’ils ont entre eux beaucoup de divergences, et parce qu’ils ne veulent pas se lier les mains et s’obliger à appliquer le Socle commun.
Taubira, grande favorite
On dit que la favorite, c’est Christiane Taubira, qui est très proche des organisateurs et est même soupçonnée d’avoir partie liée avec eux. En tout cas, elle compte clairement sur cette Primaire pour donner de l’élan à son entrée tardive en campagne. Mais la dernière rumeur en date, c’est que les militants de La France Insoumise sont en train de s’inscrire en masse pour faire gagner Jean-Luc Mélenchon. Ce serait malin : il dénonce, mais il sort vainqueur. Un dernier clou dans le cercueil de la crédibilité de cette Primaire.