Que se passerait-il si Fillon était empêché ?

Si François Fillon renonçait à être candidat, la droite aurait un sacré casse-tête à résoudre. © FRANCK FIFE / AFP
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Si François Fillon, empêtré dans les affaires, décidait de se retirer, il y aurait alors un grand flou juridique et politique autour de la candidature à droite.

L’hypothèse devient, au fil des jours, de moins en moins extravagante : et si François Fillon renonçait ? Empêtré dans une série d’affaires, dont la plus retentissante concerne l’emploi présumé fictif de son épouse en tant qu’assistante parlementaire, le candidat de la droite n’en finit plus d’être sous pression. Au point qu’un renoncement est désormais envisageable. Si tel était le cas, la droite resterait dans l'embarras. Car elle n’est prête ni juridiquement, ni politiquement.

  • Un vide juridique dans les statuts

Les données du problème sont toutes simples. Jamais, dans les statuts des Républicains ou dans la charte de la primaire, un empêchement du candidat désigné n’est évoqué. L’article 38 stipule très clairement que "le candidat (…) soutenu par le Mouvement est désigné à l’occasion d’une primaire ouverte". Seule exception : "lorsque le président est issu du Mouvement et candidat pour un second mandat".

La seule (minuscule) porte de sortie est dans ce même article 38, à l’alinéa 3. "En cas de vacance de la présidence de la République, le Conseil national décide, sur proposition du Bureau politique, s’il y a lieu d’organiser une primaire". Ce passage peut être exploité dans la mesure où il donne un certain pouvoir au bureau politique. Mais c’est mince. Très mince.

Par ailleurs, la solution ne pourra pas consister à modifier lesdits statuts. Car ce n’est pas si simple. "Les présents statuts (...) ne peuvent être révisés que par le Congrès à la majorité absolue des suffrages exprimés, sur proposition du Bureau Politique ou d’au moins un quart des membres du Conseil National", est-il écrit. Or, à moins de 80 jours du premier tour de l’élection présidentielle, le temps manque pour convoquer un congrès extraordinaire.

  • Un vide politique pour le remplacer

Si François Fillon se retire, qui sera candidat à sa place ? Pour l’heure, aucun nom ne se dégage avec évidence. Alain Juppé, finaliste de la primaire mais battu à plates coutures par son adversaire (66,5% contre 33,5%), a dit à plusieurs reprises qu’il n’envisageait pas d’être un recours. Le nom de plusieurs quadras circulent : François Baroin, Xavier Bertrand, Laurent Wauquiez. Celui de Gérard Larcher, président du Sénat, aussi. Mais  aucun ne semble avoir la stature pour l’emporter au printemps. Sans compter un manque flagrant de légitimité.

  • Réorganiser des primaires ? Quasiment impossible

Là encore, les textes des Républicains débouchent sur une impasse. "Le calendrier et les modalités d’organisation de la primaire en vue de la désignation du candidat à la présidence de la République sont fixés par la Haute Autorité au plus tard un an avant l’élection présidentielle", impose l’article 1, alinéa 4, de la charte de la primaire. Il est donc largement trop tard. Et quand bien même il y aurait la volonté de le faire, ce serait lors une primaire express, assurément peu efficace politiquement.

"S’ils me le demandent maintenant, ce serait déjà très compliqué. S’ils me le demandent dans quinze jours, ça serait impossible", tranchait déjà Anne Levade, présidente de la Haute autorité de la primaire, dans Le Monde du 28 janvier.

  • Reculer la date de l’élection présidentielle ? Très improbable

Reste une dernière solution : que l’élection présidentielle soit reportée. Tout simplement. Mais là encore, c’est compliqué. Il faut se reporter à l’article 7 de la Constitution. "Si, dans les sept jours précédant la date limite du dépôt des présentations de candidatures, une des personnes ayant annoncé publiquement sa décision d'être candidate décède ou se trouve empêchée, le Conseil constitutionnel peut décider de reporter l'élection", édicte le texte fondateur de la 5ème République. La date limite de dépôt des candidatures étant fixée au 17 mars, il faudrait donc que François Fillon renonce à partir du 10 mars pour entrer dans ce cas de figure. Le même article précise aussi, dans l'alinéa suivant : "Si, avant le premier tour, un des candidats décède ou se trouve empêché, le Conseil constitutionnel prononce le report de l'élection".

Quant au délai du report, l’article 7 n’est pas très précis. C'est, en gros, en fonction de la date de retrait du candidat que les Sages auront à se décider - avec une certaine marge de manoeuvre - sur de nouvelles dates d'élection. Détail amusant : si l’application de l’article 7 a "pour effet de reporter l'élection à une date postérieure à l'expiration des pouvoirs du Président en exercice, celui-ci demeure en fonctions jusqu'à la proclamation de son successeur". En clair, François Hollande resterait à l’Élysée un peu plus longtemps.