L'historien français Benjamin Stora a proposé mercredi à Emmanuel Macron de créer en France une commission "Mémoire et vérité", chargée de proposer des "initiatives communes entre la France et l'Algérie sur les questions de mémoire" afin de réconcilier les deux rives de la Méditerranée. C'est la proposition phare de son très attendu "rapport sur les questions mémorielles portant sur la colonisation et la guerre d'Algérie", commandé par le président français afin de tenter d'apaiser les relations volatiles entre les deux pays et les récits mémoriels concurrents et douloureux au sein même de la société française nés de la guerre d'Algérie (1954-1962).
Les grandes propositions du rapport Stora
- poursuite de commémorations aux différentes dates symboliques du conflit (accord d'Evian le 19 mars 1962, hommage aux harkis, ces supplétifs de l'armée française, et répression des travailleurs algériens en France le 17 octobre 1961)
- restitution à l'Algérie de l'épée de l'émir Abdelkader, héros de la résistance à la colonisation française au XIXe siècle
- reconnaissance par la France de l'assassinat de l'avocat et militant politique Ali Boumendjel, pendant la bataille d'Alger en 1957, reconnu par l'officier français Paul Aussaresses dans ses mémoires
- publication d'un "guide des disparus" algériens et européens pendant le conflit
- travaux sur les essais nucléaires français dans le Sahara et leurs conséquences, ainsi que celles de la pose de mines antipersonnel durant la guerre
- faciliter les déplacements des harkis et de leurs enfants entre France et Algérie
- encourager la préservation des cimetières européens en Algérie, ainsi que des cimetières juifs et des tombes des soldats algériens musulmans morts pour la France pendant la guerre d'Algérie
- avancer sur la question des archives, avec comme objectifs le transfert de certaines archives de la France vers l'Algérie, et d'autre part permettre l'accès aux chercheurs des deux pays aux archives françaises et algériennes; processus plus rapide de déclassification des documents secrets
- accorder une plus grande place à l'histoire de la France en Algérie dans les programmes scolaires et faciliter les travaux universitaires sur les sujets mémoriels entre les deux pays (facilitation de visas, d'accès aux archives, logements, etc.)
- réactiver le projet de Musée de l'histoire de la France et de l'Algérie, prévu à Montpellier (Sud) et abandonné en 2014
- entrée au Panthéon de l'avocate Gisèle Halimi, figure d'opposition à la guerre d'Algérie
- créer une commission franco-algérienne sur l'avenir du canon "Baba Merzoug", également appelé "La Consulaire", qui était déployé en protection du port d'Alger en 1830, capturé par la France et actuellement installé dans le port de Brest (Ouest)
- ériger des "lieux de mémoire" sur quatre camps d'internement d'Algériens en France