Emmanuel Macron a écarté l’hypothèse d’un âge pivot pour la réforme des retraites, pourtant au centre des conclusions rendues par Jean-Paul Delevoye, le Haut-commissaire aux retraites, se disant plutôt favorable à un système articulé autour de la durée de cotisation. "Il ne faut pas mettre sous le tapis le débat sur l’âge de la retraite. La durée de cotisation est un leurre. C’est très injuste pour toutes les générations", a estimé vendredi au micro de Sonia Mabrouk, sur Europe 1, Éric Woerth, le président de la Commission des finances de l’Assemblée nationale.
En juillet, Jean-Paul Delevoye, en charge de la réforme, avait proposé l’instauration d’un âge pivot. Si l’âge légal de départ restait fixé à 62 ans, les travailleurs partant avant 64 ans aurait dû subir une décote de 5% sur le montant de leur pension. Emmanuel Macron a pris fin août ses distances avec cette piste de réforme, largement critiquée par les syndicats. Dans un entretien à France 2, le chef de l'Etat a indiqué préférer "un accord sur la durée de cotisation"(actuellement de 43 ans, ndlr) plutôt que sur l’âge. "Si vous commencez plus tard, vous finissez plus tard, et quand vous commencez plus tôt vous partez plus tôt", a-t-il résumé.
"Les jeunes qui décident de faire des études après le bac ne sont pas en vacances, ils travaillent. L’âge de la retraite doit être le même pour tous", lui objecte sur Europe 1 Éric Woerth, qui fut lui-même en charge de la réforme des retraites lancée par Nicolas Sarkozy en 2010.
"L’intérêt général n’est pas toujours d’aller dans le sens de l’opinion publique"
Pour cet ancien ministre du Travail, Emmanuel Macron, échaudé par la crise des "gilets jaunes", tente de ménager les syndicats et l’opinion des Français. "Un compromis coûte très cher, et s’il met en danger la qualité de la réforme, alors il est injuste. Je ne vois pas pourquoi le gouvernement tente d’éviter de cette manière le débat sur l’âge, qui est un débat évident", estime Éric Woerth. "Quand vous reformez, l’opinion publique n’est pas toujours favorable, et l’intérêt général n’est pas toujours d’aller dans le sens de l'opinion publique", ajoute-t-il.
Éric Woerth appelle désormais le président de la République à trancher au plus vite, alors que doit s’ouvrir une nouvelle séquence de concertations. "Il n’a pas tort de faire attention, mais il a tort de ne pas décider, il a tort de gagner du temps. À un moment donné, il faut le faire !", lâche-t-il. "On n’a jamais peur de prendre une bonne décision." De son côté, le Premier ministre Edouard Philippe a assuré que les discussions annoncées ne repousseraient pas la présentation du projet de loi au Parlement, prévue dans le courant de l’année 2020.