Réforme des retraites : une première journée de débats houleux à l'Assemblée nationale

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Alexandre Chauveau, avec AFP , modifié à

Ce lundi, le gouvernement a tenté de défendre sa réforme des retraites à l'Assemblée nationale dans une ambiance très chahutée. De nombreux rappels au règlement ainsi qu'une suspension de séance ont retardé les discours des ministres dans un hémicycle surchauffé où les oppositions ont ferraillé sur des demandes de référendum.

Un texte "d'équité et de progrès", "la réforme ou la faillite" : le gouvernement a tenté de défendre ce lundi son projet très controversé des retraites , en ouverture des débats à l'Assemblée nationale dans une ambiance très chahutée. Série de rappels au règlement et suspension de séance ont retardé les discours des ministres dans un hémicycle surchauffé où les oppositions ont ferraillé sur des demandes de référendum sur le projet gouvernemental, qui prévoit un recul de l'âge de la retraite de 62 à 64 ans . C'est "une réforme d'équité et de progrès qui répartit l'effort de manière juste", a affirmé le ministre du Travail Olivier Dussopt, prêt à "aller plus loin" pour améliorer l'emploi des seniors ou les pensions des femmes.

Olivier Dussopt traité de "vendu"

L'ancien socialiste a été chahuté par la gauche, qui l'a traité de "vendu". "Vous faites du favoritisme pour les riches", l'a tancé l'insoumis François Ruffin, en référence aux soupçons de favoritisme visant le ministre dans l'attribution d'un marché public lorsqu'il était maire en Ardèche. A sa suite, le ministre des Comptes publics Gabriel Attal est monté au créneau contre les opposants au projet, les appelant à choisir entre "intérêt général" et "intérêt électoral". "C'est la réforme ou la faillite" du système de retraites, a-t-il affirmé, renvoyant dos à dos la Nupes et son "canon fiscal", et le RN, "camp du mensonge et des privilèges".

Les députés ont repoussé, par 292 voix contre 243, et 3 abstentions, une motion de rejet de l'ensemble du projet de loi portée par les insoumis . Leur patronne Mathilde Panot a fustigé une réforme qui "aggrave le chaos" dans la société, sans convaincre toutes les oppositions. La motion "échoue de peu, la bataille commence", pour Cyrielle Chatelain (EELV). De plus, l'Assemblée nationale a rejeté lundi soir une demande de référendum du RN pour contester la réforme des retraites, aux premières heures du débat sur le projet de loi du gouvernement. Cette motion référendaire a été repoussée par 272 voix contre 101. La gauche avait déserté l'hémicycle pour dénoncer une "mascarade", car la Nupes souhaitait qu'une autre motion soit soumise au vote: celle de la gauche ou celle initiée dans la journée par le petit groupe indépendant Liot.

"On n'est pas dans un amphi"

Dès le début de la séance, d'autres parlementaires d'opposition ont réclamé à leur tour que leur propre demande de référendum, déposée in extremis, soit aussi soumise. Charles de Courson, du groupe indépendant Liot, à l'initiative avec des représentants de six groupes politiques, a dénoncé "un déni de démocratie", rejoint par des chefs de file de la Nupes. La présidente de l'Assemblée Yaël Braun-Pivet n'a pas donné suite. Les oppositions ont alors bruyamment protesté, provoquant une brève interruption de séance. "Est-ce que vous croyez que nous allons passer 15 jours comme ça dans l'hémicycle", a demandé aux oppositions Mme Braun-Pivet. "On n'est pas dans un amphi, pas dans une manif".

Les deux semaines prévues d'examen s'annoncent à haut risque sur cette réforme phare du second quinquennat d'Emmanuel Macron, qui ne dispose que d'une majorité relative à l'Assemblée. A l'approche de deux journées d'action, mardi et samedi à l'appel de l'intersyndicale, la cheffe du gouvernement Élisabeth Borne a reconnu encore dimanche que le recul de l'âge légal représentait "un effort collectif".

Une concession de dernière minute

Dans une concession de dernière minute, elle a annoncé que les personnes ayant commencé à travailler entre 20 et 21 ans pourront partir à la retraite à 63 ans, une extension du dispositif carrières longues. Ce geste sera-t-il suffisant pour obtenir les voix, cruciales, de la droite ? Non, pour Aurélien Pradié notamment, qui pointe une "tromperie" et demande d'aller plus loin pour ceux ayant commencé à cotiser tôt. "Les enchères commencent à montrer les contradictions des LR", observe une source gouvernementale. Pour sa part, la patronne des députés RN Marine Le Pen raille une "négociation de marchands de tapis" entre le gouvernement et la droite.

Côté syndicats, l'effort de Elisabeth Borne n'a pas convaincu: une "rustine" qui "n'est pas la réponse" attendue "à la mobilisation massive constatée", dénonce Laurent Berger, patron de la CFDT.

Une mobilisation massive

Les journées de mobilisation des 19 et 31 janvier ont déjà réuni chaque fois plus d'un million de manifestants selon la police, plus de deux millions selon les organisateurs. "On compte sur le fait qu'il y ait des mobilisations pour que les élus de la République prennent en compte l'avis des citoyens", a déclaré le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez. Alors que les vacances scolaires ont commencé pour la zone A, le trafic sera fortement perturbé mardi à la SNCF et la RATP . Pour la quatrième journée de mobilisation samedi, début des congés de la zone B, les syndicats de la SNCF ont décidé de ne pas appeler à la grève pour ne pas pénaliser les voyageurs .

Quelque 20.000 amendements ont été déposés par les députés sur le projet de loi, dont 13.000 par LFI. Si l'Assemblée ne vient pas à bout des amendements d'ici le 17 février minuit, le texte passera au Sénat, du fait du choix de l'exécutif de recourir à un budget rectificatif de la Sécurité sociale.