Alain Juppé signe une rentrée tonitruante : un entretien dimanche dans le Journal du Dimanche, une interview lundi soir au JT de France 2 et une participation durant deux heures à la matinale d’Europe 1 mardi. L’ancien Premier ministre publie aussi mercredi un livre-programme consacré aux fonctions régaliennes de l’Etat intitulé "Pour un Etat fort". Beaucoup ont analysé ses 20 propositions dans le JDD comme un virage à droite mais pour le politologue Pascal Perrineau, c’est plus compliqué que cela.
"Une culture gaulliste de l’Etat fort". Celui que l’on présente souvent comme le favori des sondages pour la présidentielle a donc dévoilé ses principales propositions au JDD. Retour des peines planchers, suppression des réductions automatiques de peines, rédéfinition des conditions de légitime défense, suspension des allocations en cas d’absentéisme scolaire…. Autant de propositions qui sonnent comme un étonnant virage à droite de la part d’un homme qui prône le rapprochement avec les centristes. Mais pour Pascal Perrineau, nulle surprise dans cela : "il est dans la réhabilitation de l’Etat, en se positionnant sur le terrain de la justice, de la sécurité, de l’immigration. Or, c’est une permanence chez Juppé qui a une culture gaulliste de l’Etat fort".
"Ne pas laisser trop de place à Sarkozy". "On est en pleine préparation des primaires. Avec ce deuxième ouvrage (après un premier consacré à l’école, ndlr.), Juppé rentre dans la compétition interne en cherchant à ne pas laisser trop d’espace à Sarkozy qui monopolise les thèmes comme la sécurité et l’immigration", poursuit le politologue. Le maire de Bordeaux doit en effet démontrer qu'"il n’est pas le candidat du centre". "Il s’adresse à ceux qui vont voter", explique Pascal Perrineau, pour qui il ne faut pas oublier que ce sont les électeurs de la droite et du centre qui vont se mobiliser pour ses primaires ouvertes et non des électeurs de gauche.
Le chercheur s’attend sans aucun doute à une contre-offensive dans les semaines qui viennent du camp de l’ancien chef de l’Etat. "Les soutiens de Nicolas Sarkozy vont se manifester en prenant le contre-pied des Juppéistes. Nicolas Sarkozy a d’ailleurs demandé à ce que s’ouvre le champ programmatique des Républicains".
Etre au plus près du contexte actuel. Et puis, il y a bien sûr le contexte des attentats qui joue sur le positionnement politique d’Alain Juppé. "Il est comme tous les Français", affirme Pascal Perrineau. "Il évolue sur des thèmes sécuritaires. Il faut rassurer même s’il maintient ses exigences en matière budgétaire". En définitive, Juppé fait du Juppé : "continuer à jouer sur le terrain de l’homme d’Etat".