Emmanuel Macron avait la volonté d’être un président de la République différent, et au moins en termes de popularité, c’est réussi. Après avoir plongé durant l’été selon plusieurs études d’opinion, le président de la République est redevenu majoritairement populaire auprès des Français, à en croire les mêmes enquêtes. Pour un chef de l’Etat hors cohabitation, c’est tout simplement inédit.
Deux exemples : En août, 40% des personnes interrogées se disaient "satisfaites" de l’action d’Emmanuel Macron selon le baromètre Ifop pour le JDD. Elles étaient 52% mi-décembre. C’est plus spectaculaire encore pour l’enquête mensuelle d’Odoxa pour L’Express. En septembre, 44% des sondés estimaient qu’Emmanuel Macron était "un bon président de la République". Elles sont désormais 55%.
Voici ces deux exemples réunis en une courbe, avec en plus le baromètre Ifop pour Paris Match, dont la question est de savoir si les personnes interrogées ont "une bonne opinion" d’Emmanuel Macron
Reste à savoir pourquoi et comment Emmanuel Macron est parvenu à cet exploit inédit, quand ses prédécesseurs se sont tous installés, plus ou moins prématurément, dans une impopularité durable.
- L’été meurtrier
Si la remontée d’Emmanuel Macron parait aussi impressionnante, c’est si parce que sa chute durant l’été avait été spectaculaire : - 10 points entre juin et juillet, puis encore 14 points de moins le moins suivant, selon le baromètre Ifop pour le JDD. "Il fait tout à l’envers", s’amuse Frédéric Dabi, directeur général adjoint de l’institut de sondage. "Alors que ses prédécesseurs avaient connu un été tranquille, y compris François Hollande, pour lui, ça été très compliqué." La première raison, c’est qu’"il partait d’une base relativement faible : 24 % au premier tour, contre 28,6% pour François Hollande ou encore 31,2% pour Nicolas Sarkozy."
Mais d’autres raisons expliquent ce dévissement dans l’opinion. "Il n’y avait pas de communication, et les mesures prises étaient impopulaires", rappelle Frédéric Dabi. C’est donc la conjugaison de cette posture jupitérienne, qu’il a théorisée, et des annonces telles que la hausse de la CSG, le rétablissement du jour de carence dans la fonction publique, la réforme du Code du travail, qui ont amené à cette situation. "Il y avait un parasitage", résume le dirigeant de l’Ifop. Cette situation a contraint le président de la République à changer de fusil d'épaule.
- Une rupture avec ses prédécesseurs
S’est alors dégagé un premier sentiment, qui est, selon Frédéric Dabi, l’un des "deux leviers" qui expliquent le rebond présidentiel : la distinction par rapport à ses prédécesseurs. "Il est perçu comme très différent, et il est ainsi sorti de cette image des quinquennats inutiles ou ratés. Une majorité de Français estime qu’il incarne bien la fonction, qu’il prend de l’épaisseur. Et qu’il a comportement plus adapté", précise le sondeur. "Il y a aussi sa jeunesse. Tout cela fait que le contraste est très fort, par rapport à l’agitation d’un Nicolas Sarkozy ou la passivité d’un François Hollande."
L’autre grand levier, c’est qu’Emmanuel Macron agit. Et peu importe si l’on est d’accord ou pas avec lui. "Beaucoup de Français le disent : le grand mérite du président de la République, c’est d’une part d’agir, et d’autre part de le faire en respectant son programme présidentiel, qui lui sert de boussole. Il fait ce qu’il a dit", analyse Frédéric Dabi.
- Des oppositions, mais pas d’alternative
Enfin, le chef de l’Etat profite de la situation de ses adversaires. Seuls Jean-Luc Mélenchon et la France insoumise étaient parvenus à se dresser face à lui pendant l’été, avant de baisser progressivement de pied. "Il y a plusieurs oppositions, incontestablement. Mais aucune n’est perçue comme une réelle alternative", explique Frédéric Dabi. "C’est le fruit du big bang électoral de 2017, qui a entraîné la fin du bipartisme. Auparavant, les sympathisants de droite ou ceux de gauche pouvaient se dire que la prochaine fois ce serait leur tour", poursuit le sondeur.
Résultat : Emmanuel Macron bénéficie d’une ressource qu’aucun de ses prédécesseurs n’avait, selon le directeur général adjoint de l’Ifop. "Les Français lui laissent du temps, ils attendent de voir sur le long terme", assure-t-il. Mais attention, prévient le sondeur. Car la popularité ne fait pas tout : "Au final, ce sont les résultats qui comptent".