L'écart se creuse entre La République en Marche! (LREM) et les autres mouvements politiques pour les législatives. Dans un sondage OpinionWay-Orpi publié vendredi, le mouvement d'Emmanuel Macron est crédité de 28% d'intentions de vote au premier tour des législatives. C'est un point supplémentaire par rapport à la dernière enquête de l'institut, mais c'est surtout huit points de plus que LR et l'UDI (20%). Derrière, le Front national recueille, selon cette étude, 19% des voix, la France Insoumise de Jean-Luc Mélenchon 15%, et le PS et ses alliés plafonnent à 10%.
Avec de tels résultats au premier tour, LREM pourrait recueillir entre 310 et 330 sièges à l'Assemblée nationale. Ce qui lui assurerait largement la majorité absolue (fixée à 289 députés). Ces chiffres sont, bien sûr, à prendre avec précaution. Il ne s'agit là que de sondages, qui ne peuvent prendre en compte tous les facteurs, notamment celui de la participation. Mais quoi qu'il en soit, Emmanuel Macron n'a jamais été aussi proche de s'assurer un Parlement coopératif.
Majorité indispensable pour réformer. Obtenir la majorité absolue est indispensable pour avoir les coudées franches en matière de réformes. Sans le Parlement, difficile de faire voter les textes en suivant la procédure législative classique. Mais il n'est pas possible non plus, contrairement aux idées reçues, de légiférer selon son bon plaisir par ordonnances, puisque le gouvernement doit obtenir l'accord des parlementaires en amont, et risque un veto en aval.
Reconnaissance politique. Mais plus qu'une marge de manœuvre, c'est bien une reconnaissance politique qu'obtiendrait Emmanuel Macron en cas de majorité absolue à l'Assemblée nationale. S'il y a un an, personne ne prédisait qu'il parviendrait à se hisser au second tour de l'élection présidentielle, ni qu'il finirait par l'emporter, la question de sa capacité à obtenir une majorité parlementaire a animé les débats dès qu'il s'est positionné comme l'un des favoris du scrutin présidentiel. L'aspect extraordinaire de cette élection a beaucoup alimenté ce doute. Et l'assurance dont a fait preuve le candidat, qui n'a cessé de marteler que les Français feraient un choix "cohérent", est apparue comme un excès de confiance.
Les législatives ont souvent confirmé la présidentielle... Finalement, les sondages qui se suivent semblent, jusqu'ici, lui donner raison. "Si cela se confirme, ce serait au-delà des espérances d'Emmanuel Macron sur le plan du pari politique", souligne le politologue Olivier Duhamel. Et les législatives se présenteraient, encore une fois, comme une confirmation de la présidentielle. "Cela a quasiment toujours été le cas", tempère le spécialiste. "En 1962 et 1967, déjà, elles avaient donné la majorité au général de Gaulle. Certes, plus tard, il y a eu les cohabitations et on a pu se poser la question de la cohérence entre élections législatives et présidentielle. Mais on n'a pas attendu le passage au quinquennat [en 2002] pour que s'installe la prééminence du fait présidentiel."
" La nouveauté que représente l'élection de Macron amplifie la volonté habituelle des électeurs à donner une majorité législative au président. "
…mais cette configuration reste inédite. Même si elles ne dérogent pas à ce qui est devenu une règle, ces législatives resteraient inédites. Car le mouvement d'Emmanuel Macron vient juste de fêter son premier anniversaire. Comparons avec ce qui est comparable : en 1958, l'Union pour la Nouvelle République (UNR) est un parti tout neuf, créé pour soutenir le général de Gaulle fraîchement élu. Il va remporter les élections législatives, mais avec seulement 17,6% des voix au premier tour. "Pour LREM, on semble se diriger vers un score d'environ 30%, c'est bien plus", note Olivier Duhamel. "Une telle confirmation, pour un parti politique aussi nouveau, serait quasiment sans précédent."
"Donner au président la possibilité de réussir". Finalement, le fait qu'Emmanuel Macron se lance sans être à la tête d'un parti traditionnel, puis qu'il soit élu après une campagne pleine de rebondissements, ne semble pas le desservir pour obtenir une majorité, au contraire. "La nouveauté que représente son élection amplifie la volonté habituelle des électeurs à donner une majorité législative au président qu'ils viennent d'élire", appuie Olivier Duhamel. Pour le politologue, "les Français ont changé de regard à partir du moment où Emmanuel Macron a été élu. Ils se disent qu'ils ont osé quelque chose de nouveau. Raison de plus, alors, pour donner au président la possibilité de réussir."