La séquence avait été rocambolesque. En juin dernier, alors que les députés fraîchement élus devaient se répartir les postes clefs de l'Assemblée nationale, mauvaises combines, petits calculs et probablement un peu de naïveté étaient venus troubler le jeu. Les élus LR avaient boycotté la vice-présidence de l'Assemblée pour protester contre l'arrivée de Thierry Solère, membre des Constructifs, à la questure. En effet, sur les trois postes de questeurs, ô combien stratégiques puisqu'ils permettent de gérer le budget du Palais Bourbon, deux reviennent traditionnellement à la majorité, un à l'opposition. Et pour les députés LR fulminants, les Constructifs ne sont pas vraiment des opposants. Résultat : les élus de droite n'ont eu ni questeurs, ni vice-présidents. Et LREM a pu placer cinq vice-présidents au lieu des trois auxquels la majorité a normalement droit.
L'opposition reprend ses droits. Mais cela va bientôt changer. Mercredi, en commission des Lois, les députés ont adopté une proposition de résolution "tendant à modifier le règlement de l'Assemblée nationale". Ce texte, présenté par les présidents des groupes LREM, LR et MoDem, soit une majorité écrasante de l'Hémicycle, est destiné à "garantir la représentation effective et proportionnée de l'opposition au sein des organes de l'Assemblée". Il sera discuté en séance mardi prochain, et son adoption ne fait aucun doute.
Démissions et remplacements. Très concrètement, que va-t-il se passer dans les arcanes de l'Assemblée nationale ? Actuellement, les vice-présidents Hugues Renson, Carole Bureau-Bonnard, Sacha Houlié, Danièle Brulebois et Cendra Motin se succèdent au Perchoir pour seconder François de Rugy. Les deux premiers sont là pour un an. Les trois autres, en revanche, ont promis de remettre leur mandat en jeu si les députés LR décidaient de cesser le boycott. Un seul des trois, élu par ses pairs, pourra le conserver une fois le changement de règlement adopté.
"En PLS au milieu de la nuit". Ce qui ne va pas forcément faire les affaires de LREM. Car parmi les démissionnaires promis figurent deux des meilleurs vice-présidents. Sacha Houlié et Cendra Motin (laquelle est "même meilleure que François de Rugy", souffle-t-on dans les couloirs de l'Assemblée) ont bien tenu leurs séances. À l'inverse, Carole Bureau-Bonnard, elle, a connu des moments très difficiles au moment de l'examen de la loi confiance en séance, se perdant entre amendements et articles sous les huées d'une opposition pas toujours bienveillante. À tel point que François de Rugy avait dû venir remettre un peu d'ordre dans l'hémicycle. "Finalement, on devrait nous remercier", persifle un député LR. "C'est grâce à notre boycott que Houlié et Motin ont pu être vice-présidents, et c'était autre chose que l'autre nulle qui a dû être secourue en PLS [position latérale de sécurité] au milieu de la nuit."
Reste à régler la question du poste de questeur, que Thierry Solère ne compte pas lâcher. Chez Les Républicains, on ne digère toujours pas cet affront. Et on attend impatiemment un an supplémentaire que la questure soit remise en jeu pour la récupérer.