Emmanuel Macron va recevoir jeudi, en fin de matinée, le prix Charlemagne, la plus haute distinction européenne. Il a choisi Angela Merkel pour prononcer le traditionnel discours d’éloge du lauréat. Pour la photo ils seront tout sourire, mais dans la réalité, ils se disputent plutôt le leadership européen.
Ringarde, Angela ? Merkel et Macron, c’est l’eau et le feu. D’un côté, la physicienne pragmatique, réticente aux changements. De l’autre, le Français, ses envolées sur l’Europe, ses innombrables idées pour la réformer. Médiatiquement, Macron a gagné le match. Le jeune président glamour prend toute la lumière, il est l’interlocuteur de Donald Trump, il squatte la une de journaux. "Mutti", la maman des Allemands, semble dépassée, presque ringarde, usée par 13 ans au pouvoir.
Mais les apparences sont trompeuses. La patronne de l’Europe, c'est toujours elle. Sur l’avenir de la zone euro, par exemple, les grandes réformes rêvées par la France ne se feront pas, l’Allemagne n’acceptera que quelques mesurettes. Deuxième illustration : la réaction face à Trump et à ses taxes sur l’acier. Berlin veut un nouveau traité de libre-échange avec les Etats-Unis. Bruxelles est prête à obtempérer. Tant pis si Paris s’étrangle.
Sans elle, rien ne bougera. Jeudi, Emmanuel Macron sera récompensé pour sa "vision" d’une "nouvelle" Europe. Mais si Merkel ne bouge pas, cette nouvelle Europe risque fort de rester une "vision". A Paris on l’a bien compris, et l’immobilisme de celle qu’on appelle parfois "Madame Non" exaspère.