Celui qui clamait haut et fort sa loyauté vis-à-vis du chef de l’Etat, après le départ d’Emmanuel Macron, est-il en train de prendre ses distances ? Invité mercredi sur France Inter à répondre à la question : François Hollande est-il le candidat naturel de la gauche ?, le Premier ministre a usé de nombreuses circonvolutions avant de lâcher : "C’est une décision intime. Il doit tenir compte de la situation. Il doit donner un sens à ce que pourrait être sa candidature et à ce que pourrait être un nouveau quinquennat. Cette décision lui appartient."
Alors que le livre de confidences, Un président ne devrait pas dire ça, a semé le doute jusqu’au cœur de la majorité sur la capacité du chef de l’Etat à se présenter à sa succession, le Premier ministre affiche ses ambitions depuis plusieurs semaines, poussé notamment par plusieurs élus vallsistes. Mais pour le politologue Olivier Duhamel, le chef du gouvernement, malgré son pas de côté, reste toujours prisonnier de sa fonction.
Manuel Valls a évité mercredi d’affirmer que François Hollande était "le candidat naturel" de son camp, faut-il y voir un tournant ?
O.D. "Cela fait des mois que je dis que François Hollande ne se représentera pas. L’affaire du livre [des confidences de François Hollande, NDLR] cristallise les tensions. Manuel Valls a refusé de dire que François Hollande est le candidat naturel de la gauche, parce qu’il est impossible, aujourd’hui, de dire que le président est le candidat naturel de la gauche. Surtout, Manuel Valls a refusé de dire qu’il ne l’était pas, car un Premier ministre ne peut pas tout dire."
Pourquoi la position de Manuel Valls, qui se dit prêt à annoncer sa candidature si François Hollande ne se présente pas, est devenue si délicate ?
"Un Premier ministre ne peut pas ouvertement dire au président de la République qu’il ne peut pas se présenter. Aujourd’hui, Manuel Valls est dans la même situation que Georges Pompidou vis-à-vis du général de Gaulle en 1967-1968. En tant que Premier ministre, il ne pouvait pas lui dire que les Français ne voulaient plus de lui."
Le Premier ministre invite donc implicitement François Hollande à se retirer ?
"Manuel Valls laisse le choix à François Hollande… En tout cas, il ne le pousse certainement pas à se présenter."
Manuel Valls, longtemps présenté comme l’électron libre du PS, avec des positions clivantes, notamment sur les 35 heures, a-t-il plus de chances de rassembler la gauche que le président de la République ?
"Tout le monde, aujourd’hui, a plus de capacité de rassembler la gauche que François Hollande."