C'est l'une des mesures les plus vilipendées parmi celles prises par l'Union européenne. La directive détachement permet à des travailleurs citoyens d'un pays d'exercer des missions temporaires dans un autre État membre de l'Union européenne, en bénéficiant - en théorie - du salaire du pays d'accueil. Mais pour beaucoup, il ne s'agit-là que d'un moyen d'encourager le dumping social, en profitant de salariés venus notamment des pays de l'Est, qui sont bien meilleur marché.
Dans ce contexte, faut-il, comme le préconisent certains partis, supprimer purement et simplement la directive détachement ? Europe 1 a interrogé deux spécialistes.
"Ce serait une catastrophe". Pour Jean-Albert Guidou, élu CGT, la directive détachement encourage la fraude. Car si le salaire retenu est bien celui du pays d'accueil, les cotisations sociales, elles, "sont fixées sur la base du pays d'origine". "D'où la première difficulté : la possibilité de trouver une main d'oeuvre en réalité meilleur marché, du fait de ce décalage qui existe au niveau des taux de cotisation", pointe le syndicaliste. Mais celui-ci n'est pas pour autant pour la suppression de la directive. "Cela ne supprimera pas l'arrivée de travailleurs détachés en France", estime-t-il, puisque "le travail détaché naît d'une inégalité au niveau de l'Union européenne, entre les pays. Un certain nombre de travailleurs sont obligés de s'exiler pour travailler et faire vivre leur famille." Supprimer le peu de cadre légal qui existe "serait une catastrophe".
"Il n'y a pas assez de contrôles". Jacques Chanut, président de la Fédération française du bâtiment, un secteur où exercent beaucoup de travailleurs détachés, est, lui, beaucoup plus satisfait de la législation existante. En revanche, il réclame un renforcement des contrôles. "Il n'y en a pas assez, et pas assez de sanctions", explique-t-il. "Ce qui est terrible, c'est qu'il y a tout un pan de nos marchés des travaux du bâtiment où il n'y a pratiquement pas de contrôle : chez les particuliers. Aujourd'hui, les gros chantiers sont assez régulièrement contrôlés et les sanctions commencent à tomber. En revanche, chez les particuliers, il n'y a strictement rien de prévu." Mieux vaudrait donc donner plus de moyens à l'Inspection du travail, notamment.