Soirée très tendue mardi à l'Assemblée sur le projet de loi "asile et immigration" où les députés LR ont réussi à bloquer l'avancée des débats et à faire sortir de ses gonds la ministre Jacqueline Gourault en fin de séance. L'incident est survenu après minuit mais couvait depuis le début d'une soirée électrique sur tous les bancs.
Un "plan caché" de régularisation, selon LR. Pendant toute la soirée, les députés LR, notamment Fabien Di Philippo et Pierre-Henri Dumont, sont revenus à la charge contre le ministre de l'Intérieur Gérard Collomb, relayé ensuite par la ministre Jacqueline Gourault, pour savoir si le gouvernement avait un "plan caché de 40.000 régularisations" de sans-papiers, un chiffre évoqué par un élu de la majorité dans un article du Monde. En commission, Gérard Collomb avait juste indiqué que "lorsque nous aurons examiné l'ensemble des articles de cette loi, nous pourrons débattre de ce qu'il convient de faire au sujet des personnes qui se trouvent sans statut".
Gourault dénonce des "méthodes autoritaires". Cette insistance a fini par faire réagir Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre de l'Intérieur, en fin de séance. "M. Jacob, vous allez laisser continuer ces méthodes pendant longtemps ? Obliger un ministre à répondre ? Ce sont des méthodes autoritaires qui ne sont pas acceptables en démocratie. Qu'est-ce que c'est que ces méthodes ?", a tonné la ministre.
Un "plan caché de régularisations" ? : l'énorme colère de la ministre @j_gourault qui dénonce les "méthodes autoritaires" utilisées selon elle par le groupe Les Républicains.
— LCP (@LCP) April 18, 2018
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Christian Jacob a répondu en jugeant que Jacqueline Gourault "perdait son sang-froid". "C'est le gouvernement qui est responsable devant le Parlement, pas l'inverse", a-t-il répliqué. "Je regrette que la ministre ait décidé délibérément de ne pas répondre à nos questions", a-t-il ajouté.
Une séance sous tension. Quelques minutes auparavant, la présidente de la commission des Lois Yaël Braun-Pivet (LREM) était passée dans les rangs LR pour essayer, en vain, de pouvoir terminer dans le calme une séance qui dégénérait. Cet incident n'était en effet que la conclusion d'une soirée tendue dans un hémicycle empli de près de 200 députés, démarrée avec de multiples rappels au règlements de LR et de la gauche.
Un article sur la "réunification familiale" qui fait débat. Ces différentes oppositions demandaient qu'on revoit l'organisation des débats, prévus pour s'achever dans la nuit de vendredi à samedi avec un vote immédiat, alors qu'on n'en est encore qu'à l'article 3 (sur 40) du texte. Cet article, qui prévoit que les mineurs reconnus réfugiés pourront désormais faire venir leurs "frères et sœurs", et non plus seulement leurs parents, a déchaîné l'opposition de LR et du FN qui s'en sont pris aux "belles âmes" de la majorité et de la gauche.
Cette réunification familiale - à différencier du "regroupement familial" qui concerne les étrangers venus légalement et est soumis à des conditions financières et de logement - ne devrait pourtant concerner que quelques centaines de personnes (357 mineurs réfugiés en 2016, selon Gérard Collomb).
L'ouverture des "vannes de l'immigration" pour LR. Mais élus LR et FN ont dénoncé un "appel d'air" (Ludovic Pajot, FN), l'ouverture "des vannes de l'immigration" depuis des pays "où les fratries peuvent être importantes" (Patrice Verchère, LR). "Vous allez ouvrir une filière de mort depuis l'Afrique vers la France", a lancé Pierre-Henri Dumont (LR).
"Vous êtes irréprochables, vous aurez tous le prix Nobel de la gentillesse sociale et immigrationniste", leur a répondu le FN Gilbert Collard. Fabien Di Philippo (LR) s'en est pris au "monopole des leçons d'humanité et des bons sentiments".
À ces arguments, majorité et gauche ont défendu, comme Coralie Dubost (LREM), "une avancée humaine et juste". "C'est une question d'humanité de demander aux parents de ne pas choisir entre le mineur protégé et celui qui restera dans le pays d'origine", a répondu la rapporteure Élise Fajgeles (LREM) déplorant que LR et FN fassent "valoir absolument les mêmes arguments".
Encore 972 amendements à discuter. Au final, seuls 27 amendements ont été étudiés et l'article 3 n'a pu être soumis au vote. "Une soirée de gaspillée", déplorait une élue LREM. Reprise des débats jeudi à 9h30 avec encore 972 amendements en discussion et le retour attendu de Gérard Collomb.