Prévention et meilleur accès aux soins sont au cœur du projet de loi santé que présentera la ministre des Affaires sociales et de la Santé mercredi en conseil des ministres. Un texte attendu mais déjà très critiqué par le milieu médical. Lutte contre le tabagisme, expérimentation des salles de shoot, prévention en milieu scolaire, organisation du parcours de soins,… Voici les grandes lignes du projet de loi.
Un plan revu à la baisse ? Malgré les 10 milliards d'euros d'économies prévues entre 2015 et 2017 pour l'Assurance maladie, la ministre de la Santé Marisol Touraine promettait alors une réforme "structurante", "durable" et "mobilisatrice". Mais c'est un texte édulcoré que les députés devraient examiner début 2015. Selon des syndicats, certains passages du plan n'ont pas survécu aux contestations du milieu médical, ni au déficit de la Sécurité sociale.
Paquet neutre et e-cigarette. Salué, le volet prévention contient un éventail de mesures destinées aux jeunes, comme l'instauration d'un médecin traitant pour les moins de 16 ans ou d'un parcours éducatif en santé de la maternelle au lycée. L’une des mesures phares du projet de loi de santé, c’est bien évidemment le paquet de cigarettes neutre. Il "devrait débarquer dans les bureaux de tabac au début de l’année 2016", avait déclaré Marisol Touraine la semaine dernière. L’interdiction des cigarettes électroniques dans les lieux publics figure également dans le texte.
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Salles de shoot. Le projet de loi santé prévoit l'expérimentation de salles de shoot, destinées à réduire les risques liés à la consommation de drogue, contre lesquelles une centaine de députés se sont d'ores et déjà élevés.
Binge drinking. Le texte introduit également une infraction spécifique pour le binge drinking. Le phénomène, qui concerne un ado de 17 ans sur 2 sera puni de 15.000 euros d'amende et d'un an de prison. Le gouvernement prévoit aussi de sanctionner les personnes qui incitent les jeunes à s'enivrer le plus vite possible. Celles-ci risqueront 6 mois d'emprisonnement et une amende de 7.500 euros.
Marisol Touraine défend le projet de loi santé, mercredi sur Europe 1 :
Création d’un service territorial de santé. Dans un souci d'efficience économique et sanitaire, le projet remet l'accent sur la coordination des soins entre les différents professionnels de santé avec la création d'un service territorial de santé. Les agences régionales de santé (ARS) pourront subordonner l'attribution de subventions à l'adhésion à ce service territorial.
Carnet de santé numérique. C'est dans le cadre de ce service territorial de santé que doit être relancé le dossier médical personnel. Rebaptisé dossier médical partagé, ce carnet de santé numérique, qui n'a jamais vraiment décollé, doit passer dans le giron de l'Assurance maladie. Il pourra recevoir des documents relatifs au parcours de soins des patients, censés améliorer leur prise en charge et, notamment, une lettre de liaison synthétique, délivrée à chacun après une hospitalisation.
La généralisation du tiers payant. Globalement, le texte veut réduire les inégalités d'accès aux soins, physiquement et financièrement. Une ambition que doit concrétiser la généralisation du tiers payant, qui suscite l'ire des médecins. Ce dispositif, qui permet de ne pas faire l'avance de frais lors d'une consultation, doit être ouvert aux bénéficiaires de l'aide à la complémentaire santé (ACS) en 2015, puis à tous en 2017. Pour les médecins, sa généralisation, infaisable techniquement, entraînerait la déresponsabilisation des patients. Mais elle permettrait aussi et surtout de révéler les dépassements d'honoraires.
Déjà de nombreuses critiques. Jouant la carte de l'apaisement, Marisol Touraine déclarait en septembre aux médecins qu'une "restructuration" du système était nécessaire en ces temps "exigeants sur le plan financier", leur assurant que "la médecine libérale [était] l'épine dorsale de ce projet de loi". Mais la colère n'a cessé de monter chez les médecins, libéraux comme hospitaliers, du secteur public ou privé. En cause, les regroupements d'établissements de santé et surtout le pouvoir accru, selon les médecins, des Agences régionales de santé. A la veille de la présentation du projet de loi, plusieurs milliers de médecins hospitaliers étaient en grève à l'appel d'une intersyndicale pour dénoncer une "sensation de mépris institutionnel permanent".