Depuis la mi-octobre, un dialogue de sourds s'est installé entre Marisol Touraine et le monde médical. Généralistes, chirurgiens, internes, mais aussi infirmiers ou kinésithérapeutes: le monde médical défilera dimanche en rangs serrés contre le projet de loi santé porté par Marisol Touraine. Dès vendredi, les médecins libéraux ont ouvert la danse en entamant une grève des gardes et des urgences. Samedi, tous les professionnels de santé sont appelés à fermer leurs cabinets.
Combien de manifestants ? "Non au projet de loi santé. Tous unis pour la santé de demain". Derrière ce mot d'ordre unitaire, les soignants défileront de la place Denfert-Rochereau, dans le sud de Paris, jusqu'au ministère de la Santé, avenue Duquesne, dans le 7ème arrondissement. Les organisateurs espèrent dépasser le cap des 20.000 manifestants.
Une telle mobilisation unitaire n'a pas eu lieu depuis 2002", lors de mouvements pour la revalorisation des honoraires, assure Éric Henry, un des porte-parole du Mouvement pour la santé de tous, créé par une quarantaine d'organisations qui réclament le retrait pur et simple du projet de loi. D'autres syndicats, comme la CSMF (principal syndicat de médecins) ou MG France (premier syndicat des généralistes), ainsi que l'Ordre des médecins, plaident plutôt pour une réécriture du texte, dont l'examen débute mardi en commission à l'Assemblée nationale.
Mais quelle que soit leur stratégie, les médecins s'entendent sur une chose : ils ne veulent pas entendre parler d'une généralisation du tiers payant en 2017, qui consiste, rappelons le, en une dispense d'avance des frais pour les assurés lors d'une consultation médicale.
Touraine "n'a pas entendu la colère". En confirmant cette mesure phare lundi, Marisol Touraine s'est encore davantage attiré les foudres du monde de la santé, qui s'est senti dupé par la ministre. Sentant la grogne monter, Marisol Touraine avait rouvert le dialogue et mis en place quatre tables rondes en février. Finalement elle a fait "un triple salto arrière pour retomber sur ses pieds", ironise ainsi Éric Henry, du Mouvement pour la santé de tous. Elle "n'a pas entendu la colère médicale qui monte dans le pays", ajoute le président de la CSMF, Jean-Paul Ortiz.
Le projet de loi santé comporte un autre sujet de crispation. Les médecins redoutent un "démantèlement" de leur métier à travers la délégation de leurs tâches aux personnels paramédicaux. La possibilité offerte aux pharmaciens de pratiquer certaines vaccinations était ainsi inscrite dans le projet de loi santé. La ministre propose désormais que la mesure fasse d'abord l'objet "d'expérimentations" afin de "répondre aux inquiétudes" des médecins. Le texte prévoit également la possibilité pour les infirmiers et sages-femmes de prescrire des substituts nicotiniques.
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