Les agences sanitaires remplissent-elles correctement leurs missions ? Au lendemain de l’annonce d’un possible scandale autour du Mediator, certains professionnels de santé montent au créneau. Ils assurent qu’il y a des failles dans le système sanitaire français, à l’image de Grégoire Moutel. Cet endocrinologue et directeur adjoint du laboratoire d'éthique médicale de Paris-Descartes estime que l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) n’a pas rempli son rôle dans cette affaire.
Selon le site portail des autorités de santé, l’Afssaps a pour mission d’"évaluer, inspecter et contrôler les produits de santé destinés à l'Homme". Elle doit également "assurer et coordonner la vigilance sanitaire autour des produits de santé et alerter en cas de risque pour la santé publique".
"Pas d’indépendance totale"
"A ce jour, effectivement les agences ne portent pas haut et fort les situations qui sont douteuses", a affirmé Grégoire Moutel sur Europe 1. Il reproche à l’Afssaps qu’il faille "attendre la loi du nombre, mais aussi la pesanteur d’une pression sociale et de certains professionnels de santé pour que le déclic se mette en place".
"Les agences sont des paravents entre les systèmes de santé et systèmes politiques" :
Le manque d’indépendance est également dénoncé par Irène Frachon, médecin à l'hôpital de Brest et qui a amené à l’interdiction du Mediator. Une proscription qu’elle juge en "retard", 12 ans après les Etats-Unis et quatre ans après l'Italie et l'Espagne et estime sur LeMonde.fr que c’est "essentiellement dû à une gestion qui n'est pas satisfaisante des conflits d'intérêts au sens large et des pressions" au sein de l'Afssaps. "Il y a eu un silence impressionnant des autorités de santé jusqu'à aujourd'hui", a-t-elle reproché.
Quant aux "pressions" dont font état ces deux professionnels de santé, elles viennent à la fois de l’Etat, mais aussi des laboratoires pharmaceutiques comme le confirme le financement de l’agence. "En 2003, les ressources de l'Afssaps provenaient pour 83% de l'industrie pharmaceutique et pour seulement 6,4% de l'Etat", a précisé une commission d’enquête du Sénat, réalisée en 2005, et citée par LeMonde.fr.
"L’image de toute l’industrie pharmaceutique"
"Plus que l'image de Servier, c'est l'image de l'industrie pharmaceutique dans son ensemble qui va pâtir de cette affaire", a indiqué pour sa part l'économiste de la santé Claude Le Pen, qui pointe la faible notoriété du groupe dans le grand public jusqu'à cette affaire. Pour lui, "le débat sur les liens entre autorité de tutelle et laboratoires va donc de nouveau se poser. (…) On se demande qui est responsable, entre le laboratoire et l'autorité de tutelle qui a manqué de vigilance".