Plus d'un an après les premiers cas de Covid-19 en Chine, il ressort d'une expertise indépendante que l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et Pékin auraient pu agir plus vite et plus fort pour alerter. Dans son second rapport qui sera présenté mardi lors d'une réunion à l'OMS, ce panel d'experts mandaté par l'agence onusienne souligne qu'"il aurait été possible d'agir plus vite sur la base des premiers signes", et que des mesures d'endiguement auraient dû être immédiatement mises en oeuvre dans tous les pays confrontés à un cas probable.
Et, ajoutent-ils, "il est clair que des mesures de santé publique auraient pu être appliquées plus énergiquement par les autorités chinoises locales et nationales en janvier" 2020.
Des hésitations avant de déclarer l'urgence sanitaire internationale
La lenteur de l'OMS à réunir son comité d'urgence au début de la pandémie et ses hésitations à déclarer l'urgence sanitaire internationale, degré d'alerte le plus élevé pour une épidémie, sont également pointées du doigt. "On ne voit pas clairement pourquoi il ne s'est pas réuni avant la troisième semaine de janvier, ni pourquoi il n'a pu d'emblée s'entendre sur la déclaration d'une urgence de santé publique de portée internationale", écrivent-ils.
Depuis le début de la crise sanitaire fin 2019, l'OMS a été vivement critiquée dans sa réponse, tardant notamment à recommander le port du masque. Surtout, elle a été accusée par les Etats-Unis d'avoir été extrêmement complaisante avec la Chine, où est apparu le coronavirus, et d'avoir tardé à déclarer l'état d'urgence sanitaire mondiale.
En mai dernier, les Etats membres de l'OMS étaient tombés d'accord sur le principe d'une enquête indépendante et en juillet, le chef de l'OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, annonçait la création du Groupe indépendant chargé d'établir "une évaluation honnête" de la gestion de la crise et "tirer des leçons" pour l'avenir. Ce panel est coprésidé par l'ancienne Première ministre néo-zélandaise, Helen Clark et l'ancienne présidente du Liberia, Ellen Johnson Sirleaf.
Un terme de "pandémie" utilisé tardivement
En un peu plus d'un an, la pandémie a fait officiellement plus de 2 millions de morts, et un peu moins d'une centaine de millions de personnes ont été infectées. Ces chiffres sous-estiment probablement le bilan réel. Selon le rapport, il apparaît clairement avec le recul que le nombre des infections au stade initial de l'épidémie dans tous les pays était plus important que ce qui a été annoncé.
"Une épidémie en grande partie cachée a contribué à la propagation mondiale du virus", fait valoir le rapport. "Si l'on avait appliqué le principe de précaution aux premières indications non confirmées d'une transmission interhumaine asymptomatique, des mises en garde plus précoces et plus fortes auraient pu être lancées par l'OMS et les autorités nationales et locales concernant le risque de transmission", relève le panel.
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Quant au terme de "pandémie", "Ce n'est qu'à partir du 11 mars que l'OMS l'a utilisé", explique le rapport. Ce terme ne correspond pas à une classification du Règlement sanitaire international, un accord international sur la sécurité sanitaire mondiale entré en vigueur en 2007, mais, expliquent les experts, "son emploi permet bien d'attirer l'attention sur la gravité d'un événement sanitaire".
L'OMS avait été accusée d'avoir tergiversé avant de qualifier la situation de pandémie. Et la qualification de pandémie avait été suivie par un tsunami de mesures - dont des confinements et restrictions de circulation - dans de très nombreux pays. A ce sujet, les experts notent que si les restrictions au commerce et aux voyages ont eu un impact négatif sur les flux de produits de base, "elles ont très probablement été utiles pour freiner la transmission" du coronavirus. Là aussi, les recommandations de l'OMS, établies bien avant la pandémie, recommandaient de ne pas fermer les frontières.