Chaque personne au cours de sa vie peut faire l'objet de harcèlement scolaire ou au travail. Cependant, lorsqu'un enfant ou un adolescent y est confronté, il n'a pas forcément les armes pour s'en protéger. Ce sujet est d'ailleurs au centre des préoccupations du ministre de l'Éducation, Pap Ndiaye depuis son entrée en fonctions, l'année dernière. Pour ce dernier, la problématique doit être prise d'un autre angle. C'est pourquoi il propose depuis ce lundi que le harceleur soit transféré dans un autre établissement au lieu de l'élève harcelé, dans le cadre d'un "changement réglementaire".
Mais encore faut-il savoir que son enfant en est victime, car il n'est pas toujours évident d'en parler. Dans Bienfait pour vous, le docteur en psychologie Saverio Tomasella aide à en déceler les signes. Premièrement, selon le docteur, si les adultes harcèlent évidemment, et notamment dans l'univers professionnel, il est plus souvent dissimulé, par soucis de "cacher qu'on fait du mal à quelqu'un". Or, le harcèlement dont font preuve les enfants et les adolescents est beaucoup plus "brut, cru, direct et frontal", ce qui peut mener à un état de sidération et de peur chez ceux qui le subissent.
Une différence de traitement entre filles et garçon
Alors comment savoir si votre enfant est susceptible de se faire harceler ? Tout d'abord, il est important de rappeler qu'il n'existe pas de profil type et que tout le monde peut malheureusement en faire l'expérience. Néanmoins, certaines tendances se font remarquer : si votre enfant a pour habitude d'être "premier de la classe", de souvent répondre aux questions du professeur et de vouloir être bien vu par ce dernier, il y a plus de risques qu'il soit la cible de méchancetés de la part des élèves qui réussissent moins bien par exemple. "Mais il n'y a pas que les premiers et les premiers de la classe. Il y a aussi la petite différence, un accent différent, une région, une couleur de cheveux..."
Le docteur en psychologie analyse par ailleurs une différence de traitement entre les filles et les garçons, qui harcèlent désormais à part égale, contrairement aux générations précédentes. "Maintenant, c'est 50-50. Ce qu'on a remarqué, c'est que les garçons harcèlent plus physiquement. Et les filles, c'est la réputation, ce sont les rumeurs, les moqueries et ce sont les réseaux sociaux." En outre, il ne faut pas négliger le danger de la dynamique des meneurs/suiveurs. "Il y a ceux qui vont encourager, même stimuler le leader, l'intimidateur principal, et d'autres qui vont au contraire être des témoins silencieux, qui sont peut-être effrayés par ce qu'ils voient, et qui n'osent pas intervenir par peur d'être la prochaine victime."
Quels signes et indices peut-on remarquer ?
Mais une question taraude toujours l'esprit des parents qui découvrent le harcèlement de leur enfant : pourquoi a-t-il gardé le silence ? La plupart du temps, cette question cache trois principales raisons, comme l'énonce Saverio Tomasella. "La peur des représailles est très importante, le fait d'avoir honte aussi qui empêche d'aller dire 'je suis harcelé ou embêté'. Et puis il y a cette sidération qui, après les blagues, après les bousculades, après les mauvais traitements physiques, entraîne un moment où la personne qui est intimidée, fille ou garçon, est sous le choc", déplore le docteur, avant de poursuivre : "Son système nerveux est transi, c'est-à-dire immobilisé. Et dans ces cas-là, que ce soit adulte, enfant ou adolescent, on n'arrive plus à réagir."
Cela nous amène donc vers l'un des signes les plus conséquents que votre enfant subit un harcèlement, la chute des résultats scolaires et ainsi, de l'intérêt pour l'école, le collège ou le lycée. En découlent inévitablement d'autres signaux, brutaux, mais pas moins difficiles à déceler chez votre enfant. Si harcelé, celui-ci manifestera peut-être de l'insomnie, une perte d'appétit et donc des troubles alimentaires, le manque d'envie de se rendre à son établissement scolaire, où faire en sorte de s'y rendre pile à l'heure et non pas en avance... Mais il ne suffit pas de remarquer ces indices, car tout repose dans l'aide que l'on doit apporter à son enfant.
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Comment réagir ?
Pour le docteur Tomasella, une première façon d'amorcer le sujet est de demander comment se passe sa vie scolaire, "comment ça se passe en classe ? Comment ça se passe dans la cour de récréation ? Comment ça se passe au sport ?". Dans le cas où nulle réponse ne serait obtenue, "on peut dire 'Tu sais, ma grande, mon grand, je sens que quelque chose ne va pas en ce moment. Tu n'es pas obligé de m'en parler aujourd'hui, mais sache que je suis à ton écoute à tout moment, nuit et jour'. Car parfois, il y a des désespoirs qui naissent la nuit", spécifie-t-il. "'Je suis là, tu peux venir me réveiller si tu as besoin, m'appeler quand tu veux ou m'envoyer un texto. Si tu as un problème, je suis là pour toi. Parles-en-moi.'" Une initiative bénéfique, quelle qu'en soit son issue : votre enfant saura qu'il peut compter sur vous et qu'il a votre oreille la plus bienveillante.