Hôpitaux surchargés, cabinets désertés : depuis le début de cette crise sanitaire unique du coronavirus, les médecins ont constaté une forte baisse du nombre de consultations, conséquence très probable de la peur, chez de nombreux malades, de se rendre dans un lieu où des malades du Covid-19 se sont peut-être rendus. D'où l'appel lancé cette semaine par de nombreux syndicats et médecins à ne surtout pas arrêter de consulter.
Il y a d'abord le constat d'une baisse très significative du nombre de consultations, tout comme les visites aux urgences. "Les infarctus qu'on voit au troisième jour, des accidents vasculaires cérébraux qui arrivent trop tard, des diabètes décompensés", liste Patrick Goldstein, patron du Samu de Lille. "Ce que les urgences observent, nous l'observons aussi dans nos cabinets. Les médecins généraux assurent en temps normal 80% des urgences et s'occupent de leurs malades chroniques", souligne Jean-Christophe Calmes, vice-président du syndicat de médecins généralistes MG-France.
Risque de forts "effets collatéraux"
Cette "peur" des Français à consulter est collectivement risquée : "Les effets collatéraux à terme d'une carence de soins pourraient être aussi pénalisants que l'épidémie que nous vivons aujourd'hui", alerte Patrick Goldstein, tandis que Jean-Christophe Calmes "insiste sur le retard dans la prise en charge de patients chroniques, pour qui il faut continuer à consulter leurs médecins pour éviter des accidents aigus. Sinon, on risque de voir arriver une autre épidémie de tous les patients chroniques qui vont s'aggraver brutalement."
L'ESSENTIEL CORONAVIRUS
> Pendant combien de temps les porteurs sains sont-ils contagieux ?
> Quels sont les effets secondaires de la chloroquine ?
> Tests frelatés, faux appels aux dons... : attention aux arnaques liées au coronavirus
> Lecture, jeux de société... Comment stimuler son cerveau pendant le confinement ?
> Comment éviter de prendre des kilos pendant le confinement ?
À Lille, le CHU a appelé les malades du cancer à ne pas retarder leurs soins ou leurs consultations dans le centre spécialisé. "Depuis le départ, nous séparons attentivement les circuits et les unités qui prennent en charge le Covid-19 et les autres", assure Frédéric Boiron, directeur du CHU nordiste. "Le risque n'existe pas. Un besoin de santé urgent ne doit pas attendre par retenue des patients qui voudraient éviter de surcharger le CHU. Nous sommes organisés pour y répondre."
Des cabinets organisés
Chez les médecins, aussi, tout est désormais organisé pour limiter au maximum le risque d'une contamination chez le généraliste. "Les patients ne croisent personne au cabinet", explique Jean-Christophe Calmes. "On a souvent une téléconsultation en amont pour estimer si le problème peut être réglé à distance ou si le patient nécessite un examen clinique."
Surtout que l'épidémie va durer, anticipe le vice-président du syndicat : "MG France a publié une étude qui montre qu'on a soigné 1,5 million de patients touchés par le Covid-19. Si on rajoute les patients qui n'ont pas eu de symptômes, on arrive à peu près à 5 millions de personnes touchées, ce qui n'est pas suffisant pour que l'épidémie s'éteigne. Il faut donc absolument que les patients avec des problèmes aigus ou chroniques consultent leur médecin traitant", conclut-il.