Tous les 29 février – tous les quatre ans, donc – se tient la Journée internationale de lutte contre les maladies rares. Au delà du symbole (un jour rare pour des maladies rares), cette journée porte un combat encore bien réel : malgré les avancées certaines de la recherche et des politiques publiques ces dernières années, les défis restent encore légion et la France tarde à les relever.
Une maladie rare, qu'est-ce que c'est ? Est dite "rare" une pathologie qui n'atteint qu'une personne sur 2.000. En France, trois millions de personnes seraient concernées, selon la Plateforme maladies rares, un collectif d'associations militantes sur ce sujet. Et pour cause : il existerait entre 6.000 et 8.000 maladies de ce type. Environ 8 maladies rares sur 10 auraient une origine génétique. Certaines ne frappent qu'un à cinq patients. Mais d'autres peuvent affecter plus de 30.000 personnes. Syndrome de Williames & Beuren (malformations cardiaques, retard intellectuel et moteur, modification des traits du visage, hypersensibilité au bruit), d'Angelman (crises d'épilepsies, retard mental), du X fragile (angoisses, retard mental), Progéria (vieillissement prématuré)… Les maladies rares peuvent entraîner toutes sortes de symptômes.
D'énormes progrès… Depuis 15 ans, la lutte contre ces maladies a fait d'énormes progrès. En France, en 2004 et 2011, l'Etat a lancé deux plans Maladies rares, entraînant à chaque fois des progrès considérables. Ils ont abouti à l'amélioration de la recherche (la France se classe quatrième mondiale, en nombre de publications prestigieuses sur le sujet), la création des 131 centres de référence maladies rares (CRMR), de 501 centres de compétences (CC) et à une meilleure reconnaissance des maladies. Nombre de ces maladies sont désormais connues et répertoriées, sur le site de la plateforme Orphanet par exemple. Dans les années 70, seuls 30% des patients atteints d'une telle maladie savaient ce qu'ils avaient en sortant de chez le médecin généraliste. Cette proportion est passée à 50% aujourd'hui.
… Mais il reste encore beaucoup à faire. Cela reste encore toutefois trop peu, selon les associations. Près de la moitié des patients ignorent encore tout de leur maladie en sortant de chez le médecin. Parfois, le diagnostic peut prendre plusieurs années.
Première explication avancée à ces "errances de diagnostic" : la recherche n'avance pas autant qu'espérée. La France reste loin derrière les Pays-Bas, le Royaume-Uni et les États-Unis par exemple. "Malgré les priorités affichées par les deux plans nationaux, le développement de bases de données et de registres performants et pérennes démarre à peine. Très fragile, il nécessite d’être soutenu", écrit la Plateforme maladies rares dans un communiqué. Les associations reprochent aussi à la France de ne pas avoir "fait évoluer ses pratiques (de dépistage) depuis près de 15 ans". Elle ne s'est toujours pas, contrairement à d'autres pays européens, procurée de "plateforme de séquençage très haut débit", des technologies capables de séquencer les génomes pour avoir un diagnostic précis.
Les associations accusent également les industriels et les laboratoires de ne plus se pencher sur les nouveaux traitements. Une centaine de nouveaux médicaments a certes été commercialisée entre 1999 et 2014. Mais plus de 300 autres continuent d'être utilisés de manière illégale. La raison ? Aucun laboratoire n'est prêt à investir dessus pour réaliser des tests qui garantiraient la sécurité des patients, et donc leur autorisation de mise sur le marché. Principale raison : le faible nombre de patients concernés pour chaque maladie, et donc le peu de retombée commerciale à attendre comparées aux lourds investissements nécessaires.
Vers un troisième plan national ? Pour l'heure - et malgré les défis qu'il reste à relever - aucune action particulière n'est prévue par l'Etat. Un bilan des deux plans précédemment engagés doit simplement être dressé fin 2016. Les associations, elles, ont pris les devants et demandent officiellement lundi un troisième plan Maladies rares. Création immédiate d'une mission gouvernementale, lancement d'une campagne d'information auprès des généralistes, nomination d'un délégué interministériel Maladie rare (qui aurait autant autorité sur les médecins que les industriels ou les laboratoires de recherche), régulation des prix des traitements… Les associations réclament "de réels moyens d'impulsion, de suivi et d'injonction".
Ils ont été rejoints en cela par l'organisation représentative des laboratoires pharmaceutiques en France, le Leem, qui a lui aussi appeler à un troisième plan. "La France doit garder son leadership européen et être aux avant-postes de l'innovation", estime le directeur général du Leem, Philippe Lamoureux, dans un communiqué. Sollicité par l'AFP, le ministère de la Santé n'a pas commenté ces propositions et a renvoyé à fin 2016, date prévue du bilan des deux précédents plans.