Les autorités sanitaires et le fabricant le répétaient depuis des semaines : il était hors de question de revenir à l'ancienne formule du Levothyrox, médicament qui permet de traiter l’hypothyroïdie, un dysfonctionnement de la thyroïde. Malgré les témoignages qui s'accumulaient, dénonçant les effets secondaires de la nouvelle formule, le gouvernement semblait, lui aussi, refuser cette option. "Certains patients ont ressenti des effets secondaires (...) indésirables et très gênants. Mais ces effets devraient s'estomper avec le temps", temporisait la ministre de la Santé Agnès Buzyn au cours d'une conférence de presse, la semaine dernière. Mais la ministre a décidé de changer son fusil d’épaule, vendredi, annonçant un retour (temporaire) de l’ancienne formule d’ici 15 jours.
"Nous avons fait en sorte (...) que l'ancien Levothyrox soit accessible de façon à ce que ceux qui le réclament puissent le prendre, et ce sera disponible en quinze jours", a déclaré Agnès Buzyn sur France Inter vendredi. "Et dans un mois, nous aurons des alternatives, c'est-à-dire d'autres marques, d'autres médicaments, qui permettront progressivement aux patients de pouvoir choisir le médicament qui leur convient le mieux", a-t-elle indiqué.
Le laboratoire va importer l’ancienne formule
Comment expliquer ce revirement ? La mobilisation pour dénoncer les effets secondaires de la nouvelle formule (50 plaintes ont été déposés contre X pour "mise en danger de la vie d’autrui") semble avoir convaincu le laboratoire et les autorités sanitaires de faire une entorse à leur projet initial. Le laboratoire Merck, contacté par Europe 1 vendredi, reconnaît ainsi être en train de chercher en Europe une de leurs usines capable d'exporter en France d'ici 15 jours des lots de l'ancienne formule, qui seront commercialisés sous le nom de Euthyrox. La nouvelle formule, elle, restera sur le marché sous l'appellation Levothyrox.
Les patients munis d'une ordonnance de leur médecin qui indiquera qu'ils ne supportent pas le Levothyrox pourront ainsi avoir droit à l’Euthyrox. Ces patients-là sont estimés aujourd'hui à 9.000 par le ministère de la Santé. Et le laboratoire est en train d'évaluer le nombre de boîtes à importer pour les satisfaire.
"Nous avons entendu la difficulté des patients"
Mais ce retour à l'ancienne formule est temporaire, puisqu’il s’agit d’un médicament destiné à disparaître. En échange, la ministre promet d'ici un mois l'ouverture du marché à d'autres médicaments, d'autres marques pour que les patients puissent choisir la meilleure formule pour eux.
Levothyrox : "Nous avons entendu la difficulté des patients""Nous avons entendu la difficulté des patients et c’est pour cela que la ministre a décidé d’ouvrir le marché aux autres marques. L’une des difficultés était cette situation de monopole, et il fallait avant tout ouvrir le marché", explique Dominique Martin, directeur général de l’ANSM, l’Agence nationale de sécurité du médicament. En clair, ce retour inattendu à l’ancienne formule du laboratoire Merck n’est qu’un moyen d’assurer la transition, en attendant l’arrivée de produits concurrents.
"Nous ne revenons pas en arrière, nous faisons une offre supplémentaire. Le Levothyrox reste une formule de meilleure qualité. Pour les patients qui connaissent des difficultés persistantes, nous avons cherché une solution. L’importation de l’ancienne formule en fait partie mais elle sera nécessairement temporaire car elle est obsolète et va disparaître", insiste Dominique Martin. Reste à savoir si les futurs concurrents du Levothyrox qui arriveront sur le marché français, sur lesquels aucun détail n’a été donné, conviendront aux patients.