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Mathilde Durand
La maladie de Parkinson est la deuxième maladie neurodégénérative la plus fréquente en France. Si elle est encore incurable, des traitements médicamenteux existent pour traiter les différents symptômes, alors que les patients peuvent également bénéficier de chirurgie. Le professeur Philippe Damier, neurologue, fait le point sur Europe 1. 
INTERVIEW

Elle concerne moins de 200.000 patients en France et représente la deuxième maladie neurodégénérative la plus fréquente derrière la maladie d'Alzheimer. La maladie de Parkinson touche chaque année près de 8.000 nouveaux patients, selon les chiffres de l'Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale). Maladie encore incurable à l'heure actuelle, il existe cependant des traitements pour atténuer les symptômes tels que les tremblements ou les douleurs. Le professeur Philippe Damier, neurologue au CHU de Nantes et vice-président du comité scientifique de l'association France Parkinson fait le point sur Europe 1. 

Un premier traitement pour soulager les symptômes

"Le cœur de la maladie, c'est une petite population de cellules", résume tout d'abord le professeur. "Ce sont 500.000 cellules environ, qui ont la propriété particulière de fabriquer une molécule : la dopamine. Cette dopamine est importante pour réaliser les gestes appris au quotidien : parler, manger, marcher etc...". Ainsi, pour les malades, ces cellules vieillissent plus vite et ne produisent plus assez de dopamine pour le cerveau, d'où les différents symptômes de la maladie : tremblements, douleurs, difficultés gestuelles. Cette maladie se développe en moyenne autour de l'âge de 70 ans, mais 20% des patients déclenchent ce trouble avant 65 ans, explique Philippe Damier. 

Les traitements actuels sont "symptomatiques", c'est-à-dire qu'ils agissent sur les symptômes mais pas sur la maladie en tant que telle. Ils consistent ainsi à apporter au cerveau du patient la dopamine manquante. Il y a deux catégories de traitements médicamenteux, pouvant être administrés quotidiennement sous forme de patches ou de comprimés : Levodopa ou L-Dopa, ou les agonistes dopaminergiques, "qui entrent dans le cerveau, se fixent sur les récepteurs de la dopamine et en imitent l'effet", précise le professeur. 

Mais le patient peut être gêné par différents effets secondaires : somnolence, confusion et hallucination chez les patients les plus âgés, nausées ou encore comportements compulsifs dans certains cas. Néanmoins, la réponse est efficace dans le cadre de la maladie. "En début de maladie, si le patient n'a que Parkinson et qu'il n'est pas trop âgé, on va voir disparaître tous les symptômes", souligne-t-il. "Cela va durer en moyenne 8 à 10 ans". 

Changer le mode d'admission du médicament

"Au bout de quelques années, la réponse au traitement est moins constante dans la journée", explique Philippe Damier, qui évoque "des fluctuations". A ce moment, pour le patient, se pose la question d'un traitement de deuxième ligne, qui désigne le traitement administré après le traitement de première ligne (ou traitement initial), lorsque ce dernier ne fonctionne pas ou plus.

Pour empêcher ces fluctuations, les différents médicaments peuvent ainsi être administrés sous une forme différente, à l'aide de pompe, "qui vont administrer de manière sous-cutanée et de façon très continue le traitement", précise le professeur. Des stylos injecteurs peuvent également être utilisés. 

Une chirurgie dans certains cas 

Les patients peuvent également bénéficier, sous conditions, d'une opération de chirurgie cérébrale baptisée "neurostimulation cérébrale profonde". Cette découverte française, également connue sous le nom de stimulation cérébrale profonde (SCP), du professeur Alim-Louis Benabid et du professeur Pierre Pollak dans les années 1980-1990, consiste à implanter lors d'une opération chirurgicale des électrodes dans le cerveau, connectées grâce à un câble sous-cutanée et à une pile placée sous la peau, à la manière d'un pacemaker.

"Ce stimulateur va entraîner une décharge électrique continue dans un noyau bien précis, et cela va réguler les dysfonctions de ce noyau provoqués par le manque de dopamine", complète Philippe Damier. La stimulation des électrodes permet de réguler certains dysfonctionnements. 

Environ 5 à 10% des malades peuvent bénéficier de ce traitement lourd et doivent d'abord répondre à des critères : les signes moteurs ne sont pas trop développés, il s'agit de la maladie de Parkinson et non d'un symptôme parkinsonien ou encore le patient a moins de 70 ans. 

Des recherches en cours

Outre les traitements existants, la recherche médicale est toujours à l'œuvre pour découvrir de nouvelles thérapies. L'association France Parkinson, qui a notamment pour mission d'informer les patients sur la maladie, ses traitements et ses effets secondaires, en finance par ailleurs une partie à hauteur d'un millions d'euros par an. 

"Un des meilleur espoirs aujourd'hui a trait aux immunothérapies, en quelque sorte un vaccin", explique le professeur. "Dans la maladie, il y a une protéine qui s'accumule anormalement qui s'appelle l'alpha-synucléine. On injecte chez les patients des anticorps monoclonaux pour essayer d'enlever ces protéines anormalement agrégées dans leur cerveau." Pour simplifier, cette protéine, dans certaines formes, joue un rôle dans l'apparition de la maladie de Parkinson. L'immunothérapie consiste à aider au développement d'anticorps ou à inoculer au patient des anticorps artificiels qui reconnaîtront l'alpha-synucléine, s'attacheront à elle et favoriseront son élimination.  

Ce protocole est encore en phase 2 de recherche, c'est-à-dire la phase précoce d'essai thérapeutique chez l'être humain. "On a quelques signaux encourageants", confie le professeur Philippe Damier. "D'ici 3 à 5 ans, on pourrait espérer avoir ce traitement qui permettrait de freiner l'évolution de la maladie et d'empêcher certaines complications qu'aujourd'hui on ne sait pas traiter."