L'alcool est "le grand absent du financement" du fonds de lutte contre les addictions aux substances psychoactives, s'insurgent des médecins dans une lettre ouverte à la ministre de la Santé, Agnès Buzyn.
L'alcool taxé plus fortement pour financer un fonds de prévention. Dans ce courrier, ils lui demandent jeudi de faire participer l'alcool, en le taxant plus fortement, au financement de ce fonds de prévention, dans le cadre du projet de budget de la Sécurité sociale pour 2019 (PLFSS 2019). Le projet prévoit que le champ d'intervention de ce fonds, constitué de 100 millions d'euros provenant des taxes du tabac, sera élargi aux addictions liées aux substances psychoactives (alcool, cannabis), explique le professeur Michel Reynaud, président d'Actions addictions, co-signataire de cette missive.
Trop peu de moyens selon les signataires. Dans le cadre de la prévention, le projet de financement de la Sécu prévoit de faire bénéficier ce fonds de nouvelles ressources "correspondant au produit des amendes forfaitaires sanctionnant la consommation de cannabis (10 millions d'euros en 2019)". Cette augmentation de 10 millions d'euros "relève d'un effet d'annonce sans commune mesure avec la dimension du problème" de l'alcool en France, estiment les huit signataires.
La loi de financement de la Sécurité sociale doit intégrer dès 2019 "une taxe sur les boissons alcoolisées" proportionnelle aux degrés d'alcool "pour financer les soins" et "une taxe sur les dépenses de publicité, y compris sur Internet - pour financer la prévention", notent-ils.
D'importantes conséquences sur la santé. Au-delà des 49.000 morts annuelles directement causées par sa consommation, l'alcool est la deuxième cause de cancers, la première cause de mortalité chez les 15-30 ans, la première cause de démence précoce. L'alcool est aussi impliqué dans plus de la moitié des violences faites aux femmes et aux enfants.
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L'alcool est de surcroît la première cause de retard mental évitable de l'enfant (né d'une femme qui buvait pendant la grossesse), poursuivent-ils. La prévention gouvernementale en matière d'alcool se limite à une "discussion picrocholine", dérisoire, sur la taille en millimètres du pictogramme "interdit aux femmes enceintes", déplorent-ils.
Huit signataires. Outre le Pr Reynaud, les signataires sont l'épidémiologiste Catherine Hill, les professeurs Amine Benyamina (psychiatrie, addictologie), Gérard Dubois (santé publique), Serge Hercberg (nutrition), Albert Hirsch (pneumologue) ainsi que le président et vice-président de l'Association nationale de prévention en Alcoologie et addictologie (Anpaa) Nicolas Simon et Bernard Basset.