Les autorités sanitaires françaises vont demander à l'Europe de redéfinir les modalités d'utilisation de l'Androcur, médicament qui peut multiplier jusqu'à 20 le risque de certaines tumeurs chez les femmes traitées longtemps et à hautes doses, a annoncé jeudi l'Agence du médicament ANSM. Cette demande va être formulée sur la base d'une nouvelle étude qui quantifie le risque pour la première fois.
Ce risque lui-même est connu de longue date et figure depuis 2011 sur la notice de ce traitement hormonal. Il est utilisé pour combattre une pilosité excessive dans des cas particuliers, mais aussi dans le traitement de l'endométriose, hors de son autorisation de mise sur le marché (AMM). Rendue publique fin août, l'étude a été réalisée par l'ANSM et l'Assurance maladie.
Elle montre que le risque de méningiome, une tumeur au cerveau le plus souvent bénigne, est "multiplié par 7 pour les femmes traitées par de fortes doses sur une longue période (plus de 6 mois) et par 20 après 5 années de traitement".
Un risque important qui a "surpris". "On s'attendait à trouver un risque" mais son importance chez des femmes traitées à haute dose et sur de longues durées "nous a surpris", explique l'endocrinologue Jean-Michel Race, de l'ANSM. "Cela constitue un fait nouveau qu'il faut prendre en compte dans l'évaluation du rapport bénéfice/risque de ce produit", poursuit-il. Pour autant, les autorités sanitaires ne jugent pas nécessaire de retirer ce médicament du marché. "Il a des bénéfices dans les indications qui sont les siennes", souligne le docteur Race. Elles veulent en revanche "repréciser ces indications" pour éviter les utilisations impropres.
Une seconde réunion d'experts le 1er octobre. Objectif: "Confirmer qu'il ne faut pas l'utiliser dans les pathologies plus légères (que celles pour lesquelles il est indiqué, ndlr) et définir pour combien de temps et avec quelles posologies maximales" il doit être prescrit, selon le docteur Race. Après une première réunion d'un comité d'experts indépendants le 13 juin, une seconde aura lieu le 1er octobre. "On aura alors les grandes lignes en termes d'indication, de durée et de posologie", explique le docteur Race.
Ces données seront transmises au niveau européen "avant la fin de l'année" pour une procédure dont l'issue est espérée en 2019. L'acétate de cyprotérone, nom générique de l'Androcur, est un médicament qui bloque l'activité des hormones mâles. Selon le docteur Race, "89.000 femmes ont fait l'objet d'au moins une prescription en 2017".