Les indicateurs nationaux de Covid-19 se dégradent depuis plusieurs semaines et le spectre d'une seconde vague de l'épidémie se rapproche. Invité d'Europe 1, jeudi midi, Frédéric Adnet, chef de service des urgences de l'hôpital Avicenne de Bobigny, évoque une "montée progressive" du nombre de patients.
L'expression était lointaine, à la fin du printemps et pendant l'été, quand l'épidémie refluait dans toutes les régions après le confinement. Mais depuis plusieurs semaines, à mesure que les indicateurs se dégradent au niveau national, elle se matérialise : la "seconde vague" de coronavirus menace de submerger les capacités hospitalières de la France. Frédéric Adnet, chef de service des urgences de l'hôpital Avicenne de Bobigny, en Seine-Saint-Denis, était l'invité de Patrick Cohen sur Europe 1, jeudi midi, pour évoquer la situation épidémique actuelle en France.
"On n'est pas encore en débordement, on est en saturation", précise le responsable du Samu 93. "Actuellement, nous vivons un retour de ces patients, mais un retour sur un continuum. Il y a une montée progressive du nombre de patients que l'on voit arriver aux urgences, entre un et dix par jour. Au sommet de la vague, nous étions à 100 par jour", explique Frédéric Adnet, selon qui la première vague du printemps ressemblait à un "un tsunami qui a failli tous nous emporter".
Menace pour les patients "non-Covid"
Cette montée du nombre de patients aux urgences est "progressive, mais constante" : "C'est ce qui met en danger l'hôpital. Ça fait un mois qu'on a des patients qui arrivent. C'est un flux constant qui finit par saturer nos lits, nos lignes de réanimation, nos lits d'hospitalisation."
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Cette montée "qui dure" représente une "menace" pour les interventions sur les patients "non-Covid" à l'hôpital : "On a fixé des seuils", détaille Frédéric Adnet à propos des mesures de la progression de l'épidémie. "Le seuil de malades admis en réanimation a été fixé à 30%. Actuellement, en Ile-de-France, on est à 32%. C'est un seuil à partir duquel on doit commencer à avoir une politique de déprogrammation, ce qui n'est pas anodin. C'est une mesure majeure qui va faire perdre des chances (de survie) à certains patients pour s'occuper d'autres patients."
Responsabiliser la population
Mais pour autant, Frédéric Adnet ne déplore pas un manque d'efforts sur la hausse du nombre de lits de réanimation depuis mars : "Former des personnels spécialisés prend énormément de temps. Ça ne se fait pas en quelques mois, c'est une politique sur le long terme." Par exemple, un médecin réanimateur a fait onze ans d'études, une infirmière au moins trois ans. En revanche, le chef des urgences de l'hôpital Avicenne estime qu'"il faut clairement se mettre dans une politique d'ouverture de nouveaux lits et tout de suite arrêter la fermeture des lits et des hôpitaux publics".
Pour le court-terme, en revanche, le professionnel insiste sur la nécessité absolue de respecter les gestes barrières, ce qui passe davantage par une responsabilisation qu'une punition de la population. Une population dont le comportement estival a conduit à générer cette seconde vague, pointe Frédéric Adnet : "Ce qu'on paye actuellement, c'est probablement un relâchement extrême qu'il y a eu après le déconfinement."