Un médecin dénonce : "Certains hôpitaux français sont dignes du tiers-monde"

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Michaël Peyromaure, chef du service urologie de l’hôpital Cochin à Paris, publie un livre intitulé "Hôpital, ce qu’on ne vous a jamais dit". Invité lundi soir sur Europe 1, il a livré un constat alarmiste de l’état du système hospitalier et formule plusieurs propositions choc.
INTERVIEW

Il dresse un tableau extrêmement sombre du système hospitalier français. Michaël Peyromaure, chef du service urologie de l'hôpital Cochin à Paris, livre une vision particulièrement pessimiste dans son ouvrage Hôpital, ce qu’on ne vous a jamais dit (éditions Albin Michel). "Certains hôpitaux français sont dignes du tiers-monde", a-t-il même assuré, lundi soir sur Europe 1. Le médecin a également formulé plusieurs propositions chocs pour remédier à la crise du secteur, comme une hausse des salaires mais aussi une augmentation du temps de travail des soignants, ou encore la fin de la gratuité des soins.

"Un quart des hôpitaux français sont à la traîne"

Premier constat partagé par l’urologue : "Certains hôpitaux français sont dignes du tiers-monde, puisqu’on n’a pas investi depuis une, deux ou trois décennies. Il y a encore des chambres à quatre lits dans certains services de chirurgie, c’est inacceptable ne serait-ce que pour des raisons de contagion infectieuse. La santé a malheureusement stagné dans notre pays."

"Beaucoup d’hôpitaux, pas partout, sont encore à la traîne. Un bon quart des hôpitaux français sont en retard je pense, notamment dans les petits établissements de province qui n’ont pas pu être rénovés", juge Michaël Peyromaure.

Il propose une augmentation des salaires de 20%, en contrepartie d’une augmentation du temps de travail

Le médecin propose également d’augmenter les salaires de 20% à l’hôpital. Mais il demande, en contrepartie, une augmentation du temps de travail, une proposition potentiellement choc. "Il faut rétablir la vérité. Les médecins et les cadres de direction travaillent énormément. Pour ce qui est du personnel soignant, infirmières et aides-soignants, ils travaillent dans de mauvaises conditions. Mais il faut aussi reconnaître que leur temps de travail est assez confortable par rapport à d’autres pays", estime le chef de service à l’hôpital Cochin.

"C’est vrai qu’on voit très souvent des personnels se plaignant d’avoir fait des heures supplémentaires mais ça n’existe que pour une minorité d’agents. Quand ils sont amenés à faire cela, ils récupèrent", poursuit-il. S’il partage le constat de personnels soignants débordés pendant la crise du coronavirus, il assure que "ce que vous n’avez pas vu, c’est que 50% de l’hôpital était à l’arrêt et était payé à ne rien faire". "Aujourd’hui les gens comptent leurs horaires, ce qui n’était pas le cas avant. Il y a une fonctionnarisation de l’ensemble du système qui plombe l’hôpital", pointe-t-il du doigt.

La responsabilité de la bureaucratie

Michaël Peyromaure s’en prend également au modèle de gouvernance de l’hôpital, une critique régulièrement formulée ces derniers mois. "Avant, l’hôpital était aux mains des médecins et des soignants et le patient était au cœur des préoccupations. On a mis en place une gouvernance administrative et rigide qui a créé beaucoup inertie", cingle-t-il.

Et concernant le Ségur de la Santé, conclu cet été et qui a abouti sur une hausse des salaires et des investissements de plusieurs milliards d’euros, il juge que "les annonces sont faites, reste à savoir si les actes seront joints aux paroles."

Il veut en finir avec la gratuité des soins

Mais la proposition la plus explosive de ce livre est la fin de la gratuité des soins, fondement du système social français. "Je ne veux pas passer pour un méchant anti-social mais c’est la vérité. La sécurité sociale a été faite en 1945-1946 à une époque où les gens mourraient très tôt après leur retraite. Aujourd’hui, les gens passent autant de temps en retraite qu'en vie active et développent plusieurs maladies qui ne deviennent pas létales mais chroniques, et dont les traitements sont de plus en plus coûteux", explique Michaël Peyromaure. 

"Tant qu’on voudra rembourser tous les bobos du quotidien, la sécurité sociale sera dans le rouge et on ne pourra plus investir dans les hôpitaux et les salaires des personnels", juge-t-il. "Les inégalités de soins existent déjà. Il y a 5 millions de personnes qui ont la CMU (couverture maladie universelle), et de nombreux petits salaires qui eux ont un reste à charge."