Une mission parlementaire propose mercredi de faciliter la reconnaissance du burn-out en maladie professionnelle et de créer une agence nationale de la santé psychique au travail pour mieux cerner cette "réalité grandissante". "Les réponses qui ont été données jusqu'à aujourd'hui à cette réalité sont a minima insuffisantes voire inadéquates", a estimé Gérard Sebaoun, député PS du Val-d'Oise, rapporteur d'une mission d'information relative au syndrome d'épuisement professionnel.
"Nous avons encore des difficultés à prendre en compte cette nouvelle souffrance psychique et notamment à la prévenir", a-t-il déclaré lors de la présentation des 27 propositions de la mission, devant la Commission des Affaires sociales de l'Assemblée nationale.
30.000 Français touchés par le burn-out entre 2007 et 2012. Le burn-out toucherait "des dizaines de milliers, voire des centaines de milliers de personnes", selon Gérard Sebaoun. Mais il n'existe aucune étude épidémiologique spécifique sur le sujet. L'INVS, devenu Santé publique France, évaluait à 30.000 le nombre de travailleurs touchés, sur la période 2007-2012. Actuellement, le burn-out n'est pas reconnu dans le tableau des maladies professionnelles. Seuls des comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles peuvent statuer au cas par cas. Cependant, un seuil de 25% de taux d'incapacité permanente est requis, un "verrou" qui "limite" le nombre de dossiers reconnus (418 en 2015), a regretté Gérard Sebaoun, à l'instar de nombreux professionnels.
La mission parlementaire anticipe un afflux des dossiers liés au burn-out. Après avoir auditionné une centaine de personnes, la mission propose donc "une expérimentation de l'abaissement" à 10% de ce taux, voire "sa suppression". Anticipant une "affluence de dossiers", elle demande "d'améliorer considérablement les moyens" des comités. Insistant sur le "problème de définition" du burn-out, le président de la mission, Yves Censi, député LR de l'Aveyron, a prévenu qu'il "sera très important d'être précis" et "ne pas tomber dans les confusions" avec d'autres pathologies : surmenage, anxiété, dépression, etc.
Les députés veulent un centre national consacré à la santé psychique au travail. Pour "approfondir les connaissances", la mission suggère également de créer un "centre national de référence consacré à la santé psychique au Travail", placé sous l'autorité de Santé publique France, et d'évaluer le coût économique et social, "astronomique", des pathologies psychiques liées au travail. Il avait été chiffré en 2007 à entre 2 et 3 milliards par an "rien que pour le stress au travail", selon Gérard Sebaoun. Autre proposition : protéger les médecins, notamment du travail, pour qu'ils ne soient pas attaqués par les employeurs lorsqu'ils établissent un lien entre la pathologie et les conditions de travail. Les députés souhaitent également faire de la prévention des risques psycho-sociaux (RPS) un sujet de négociation obligatoire dans les entreprises où la santé au travail "doit devenir un élément clef de la stratégie".
Vers des stages des patrons au milieu de leurs employés ? Ils suggèrent aussi d'obliger les managers à effectuer un stage parmi les salariés, sur le modèle des "stages ouvriers", afin de se rendre compte de leurs conditions de travail. Enfin, elle recommande une certification des cabinets spécialisés dans les RPS.
Ce travail parlementaire s'inscrit dans la suite de la loi Rebsamen, qui en août 2015, avait simplifié la procédure d'accès aux comités régionaux d'évaluation. Un groupe de parlementaires socialistes, emmenés par Benoît Hamon, en était à l'origine. La reconnaissance du burn-out comme maladie professionnelle est inscrite dans le programme du candidat PS à la présidentielle.