Brûler la graisse, améliorer l’endurance, perdre du poids, prévenir le diabète et les accidents vasculaires… Les bienfaits du sport sont nombreux et reconnus. Cependant, selon une étude récemment réalisée par des chercheurs de l’Institut Salk en Californie et relayée par Cell Metabolism, il serait bientôt possible d’obtenir ces effets bénéfiques sans même avoir à pratiquer une activité physique. Mais le sport sans effort, est-ce vraiment possible ? Le Professeur Jean-François Toussaint, spécialiste en physiologie et directeur de l’IRMES (Institut de Recherche bioMédicale et d'Epidémiologie du Sport) nous éclaire.
Considérez-vous cette étude comme révolutionnaire ? L’expérience en question, menée sur des souris sédentaires, a montré qu’il existait une molécule expérimentale, dite GW1516, capable de modifier l’expression de centaines de gènes, et ainsi d’intervenir dans le processus d’élimination des sucres. Ainsi, cette étude est extrêmement intéressante sur le plan scientifique, puisqu'elle démontre une fois de plus la puissance de l’ADN et les conséquences du génome sur l’organisme. Cependant, ce n’est pas parce que cette molécule semble provoquer chez l’animal les conséquences positives du sport qu’elle serait tout autant bénéfique pour l’homme. Son action demeure partiellement inconnue.
" A ce jour, il n'existe aucune pilule pouvant remplacer le sport "
Dans l’hypothèse où cette pilule se révélerait bénéfique, pourrait- elle, à terme, remplacer la pratique sportive ? A ce jour, il n’existe aucune pilule pouvant remplacer le sport. En effet, une molécule n’engendre qu’un seul stimulus, et est ainsi incapable de couvrir la totalité et la diversité des effets bénéfiques découlant de l’exercice physique. Pour ce qui est des maladies du vieillissement en particulier, telles que le cancer ou les maladies cardio-vasculaires, le sport reste donc clairement la meilleure prévention.
Vous méfiez-vous d’une pilule qui serait fabriquée à partir de cette molécule expérimentale ? Il faut rappeler que la molécule GW1516 n’a pas été mise au point récemment, et que sa première fabrication remonte aux années 1990. Le risque résidant dans l’utilisation de cette molécule est simple : associée à d’autres molécules, GW1516 pourrait se révéler très nocive. Par exemple, si elle est associée à l’Aicar, une molécule permettant d’augmenter sa masse musculaire, GW1516 pourrait être porteuse de risques cancéreux. De plus, une telle pilule risquerait d’engendrer une déstabilisation de l’équilibre génique et biochimique de l’organisme. Le danger est donc réel, et c’est d’ailleurs bien pour cela que l’utilisation et la commercialisation de GW1516 sont proscrites par l’Agence mondiale antidopage depuis les Jeux Olympiques de Pékin en 2008.
Que nous dit cette récente étude de l’état d’esprit actuel des chercheurs en biologie moléculaire ? Cette étude est représentative de tout un pan de la recherche en biologie moléculaire actuelle, focalisé sur la quête de performance physique. On voit bien que l’idée d’un « sport sans effort » intéresse de plus en plus. Le responsable de l’étude, Ronald Evans, était d’ailleurs déjà le directeur d’une recherche en 2008 portant sur un gène jouant un rôle important dans le métabolisme des acides gras, le gène PPAR delta.