La Haute autorité de santé a dévoilé lundi ses recommandations quant à la future politique vaccinale en France. Elle préconise cinq phases de vaccination, en fonction du nombre de doses de vaccin disponibles et de la vulnérabilité des personnes face au Covid-19 et à ses formes sévères. Sur Europe 1, Didier Pittet, infectiologue, chef du service de prévention et contrôle de l’infection aux Hôpitaux universitaires de Genève rappelle qu'au début de la campagne, la phase destinée aux 700.000 résidents d'Ehpad, un seul vaccin sera sûrement disponible.
Une priorisation nécessaire
"Il y aura certainement un début de vaccination pour lequel il y aura un seul choix. Ce vaccin sera utilisé dans les Ehpad. Et puis ensuite, au moment, où les moins vulnérables seront vaccinés, il y aura davantage de choix", explique l'infectiologue. Pour autant, cette priorisation en direction des personnes les plus âgées, donc les plus vulnérables, est nécessaire selon lui. "Les personnes dans les Ehpad sont très vulnérables. On a vu beaucoup de décès en ces lieux, malheureusement. Il est certain que de pouvoir à la fois les visiter car ils sont protégés de la maladie, et vivre leur fin de vie dans des bonnes conditions, c'est le bon choix", souligne Didier Pittet. "Quand il faut choisir entre des effets secondaires, la plupart du temps extrêmement modestes et un risque pour votre vie, pour que votre famille puisse continuer de venir vous voir, je crois que le choix est vite fait."
Le premier disponible devrait être le vaccin américano-allemand Pfizer-Biontech, mais il doit se conserver entre -70 et -80 degrés. Il faudra donc mettre en oeuvre une logistique particulière pour acheminer les doses. "Certains vaccins seront plus facile à administrer à certaine personnes qu'à d'autres", confie Didier Pittet. "Le plan est prêt mais comme toujours, un plan demeure un plan. Pour le 'mettre en musique' il y a toujours des petites difficultés et notamment, il faut ces fameux congélateurs, qui ne sont pas des raretés mais il faudra en acquérir dans beaucoup d'endroit pour pouvoir acheminer les doses de vaccin jusqu'à l'endroit d'inoculation."
Plus de vaccins donc plus de choix dans la logistique
L'existence de plusieurs vaccins permettra donc de soulager, dans un second temps l'organisation logistique puisque tous ne nécessitent pas des conditions si drastiques de stockage et de circulation. Certains par exemple pourront se conserver simplement au réfrigérateur, quand d'autres "ne seront disponibles qu'en multidoses", explique l'infectiologue. "A partir du moment où vous avez ouvert une boîte, vous devez injecter cinq à dix personnes selon les vaccins. Ce qui présente un autre défi d'organisation", ajoute-t-il.
"Il faut bien savoir que cela va prendre du temps. Le personnel de santé sera aussi prioritaire. Entre le personnel de santé et celui des Ehpad cela fait environ 1,5 millions de personnes. Lorsqu'on élargit aux personnes vulnérables, on arrive rapidement à 30 millions, ce qui fait 60 millions de doses", rappelle Didier Pittet. "Fort heureusement il y aura plusieurs vaccins, mais cela fait beaucoup de doses à administrer qui ne seront pas disponibles immédiatement. Il faudra un calendrier qui va s'étendre sur toute l'année voire plus d'une année.
"En tant que patient, vous aurez le choix d'être vacciné ou non. Et dans l'idéal, ce choix vous pourriez en discuter avec votre médecin traitant", rassure également Didier Pittet. "On n'a pas toutes les réponses sur tous les vaccins qui seront à disposition, mais il y en a plus d'une dizaine qui sont très avancés dans la course." Une course nécessaire selon l'infectiologue, puisque tous les vaccins découverts seront utiles et permettront de toucher l'ensemble de la population.
Contrairement à l'Allemagne, la France n'a pas prévu pour l'instant de mettre en oeuvre des centres de vaccination. "Je ne crois pas qu'il n'y ait de meilleures stratégies mais que chacun s'organise en fonction de ses capacités. Pour l'instant monter des centres de vaccination à large échelle n'est pas encore utile puisque les doses de vaccins qui ont déjà été attribuées entre les pays, ne sont pas suffisantes pour justifier l'utilisation de centres", commente l'infectiologue. "Il n'est pas exclu qu'au cours de l'été, si les compagnies qui produisent ces vaccins, peuvent produire les larges quantités qui ont été commandées, il faille ouvrir des centres de vaccination particulier, dit 'de masse'"."