"En rentrant au camp, nous avons traversé une zone que nous avions pas prospectée. J'ai jeté un coup d'œil et il y avait cet os, là… Et quand j'ai regardé la pente sur laquelle il se trouvait, je pouvais voir un morceau de crâne, une partie importante de mâchoire, d'autres os. Ce n'était pas un singe". Donald Johanson, Ethiopie, 1974. Voilà comment le paléoanthropologue américain raconte simplement la découverte de Lucy le 30 novembre, il y a 40 ans. Bien qu'aujourd'hui d'autres squelettes plus anciens aient été découverts, celle qui a remis en cause les croyances sur nos origines est encore populaire.
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Un squelette complet à 40%. Donald Johanson, en 1974, gratte la terre en Ethiopie en compagnie de plusieurs collègues dont le Français Yves Coppens, près des berges de la rivière Awash. La découverte au hasard de quelques os va chambouler les croyances des scientifiques de l'époque. Premier intérêt de Lucy : elle livre 52 de ses os, soit 40% de son squelette. Le trésor déterré par les scientifiques contient une mandibule, des morceaux de crâne, des bouts de bassin et de fémur. Mais ne proviennent-ils pas de plusieurs individus ? Non, concluent les chercheurs, qui observent qu'aucun os n'est en double.
Une femme bipède mais sans plus. Grâce aux os du fémur et du bassin, les chercheurs découvrent vite que le squelette était une femme d'1 mètre 20 qui marchait sur… ses deux jambes. De là à voir en elle l'ancêtre de l'homme, il n'y a qu'un pas. D'autant plus que la datation de 3 millions d'années en faisait alors le plus vieil ascendant jamais découvert. Cependant, malgré sa capacité à la bipédie, Lucy gardait quand même une préférence pour la vie dans les arbres.
Son prénom (populaire dans les années 1970 avec notamment la chanson "Lucy in the sky with diamonds") et des reconstitutions la rendent vite attachante auprès du grand public qui voit alors en elle la "grand-mère" de l'humanité. Chose rare à une époque où seuls les paléoanthropologues s'intéressaient à cette matière scientifique, a priori aride.
Notre ancêtre ? Non, une lointaine cousine. Cependant, le temps passant, les analyses des os de Lucy se poursuivent. En 1979, dans la revue Science, Lucy devient Australopithecus afarensis. En français, "le singe austral de l'Afar", région où elle a été découverte. Mais alors en quoi Lucy a révolutionné les connaissances sur l'origine de l'homme ? Lucy n'est en fait pas notre ancêtre directe mais seulement une cousine lointaine. Ce qui n'enlève rien à son intérêt, bien au contraire. C'est Yves Coppens, paléoanthropologue français, qui, dès 1981, avance qu'elle appartient à une évolution séparée de la nôtre et qui serait restée attachée à la vie arboricole.
D'où la comparaison que fait souvent Yves Coppens entre l'évolution des espèces et un … bouquet. Plutôt qu'une évolution linéaire, il faut donc plutôt voir dans cette évolution de multiples branches et séparations. Lucy étant située sur l'une d'entre elles.
Depuis, des nombreux "concurrents". Lucy garde aujourd'hui toute sa popularité, bien que d'autres squelettes aient été découverts depuis 1974. Un "concurrent" a entre autre été découvert en 1994. Découvert au Kenya, Australopithecus anamensis a un million d'années de plus que Lucy, soit 4 millions d'années. Paradoxalement, ses os, plus anciens, démontrent qu'il avait en grande partie abandonné les arbres pour privilégier la bipédie. Preuve que l'évolution des différentes branches ne s'est pas faite de manière parallèle.
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Et l'homme dans tout ça ? Alors que Lucy vivait il y a 3 millions d'années, c'est au même moment qu'une nouvelle branche prend naissance, la nôtre.
Le genre Homo, caractérisé par un gros cerveau, une bipédie à 100% et la capacité de fabriquer des outils, va alors fleurir en plusieurs bourgeons : habilis, ergaster, neandertalensis, floresiensis et … sapiens, autrement dit l'être humain.
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