Un glacier de l'Antarctique grand comme la France, en train de fondre sous l'effet du réchauffement climatique, flotte davantage sur l'océan que ce que pensaient jusque là les scientifiques, aggravant les risques de hausse du niveau des mers, ont dit mardi des chercheurs.
Un pied sur Terre, un pied dans l'océan. Le glacier Totten, dans l'est de l'Antarctique, est l'un des plus grands glaciers du continent blanc. Comme d'autres calottes glaciaires, il est surveillé de près car susceptible de libérer des quantités énormes d'eau, menaçant les centaines de millions d'humains vivant en zones côtières. Une partie du glacier repose sur le substrat rocheux et l'autre se répand à la surface de l'eau, où elle flotte. Cette dernière partie, la barrière de glace, est plus vaste que ce qu'estimaient jusqu'alors les spécialistes.
"Le glacier est en train de flotter". Dans le cadre du Programme Antarctique australien, des chercheurs emmenés par le glaciologue Ben Galton-Fenzi, dont des scientifiques de la Division australienne de l'Antarctique et de la Central Washington University, ont passé l'été à étudier le Totten. Dans un communiqué publié en fin de mission, le professeur Paul Winberry, de la Central Washington University, explique qu'ils ont provoqué artificiellement des ondes sismiques pour étudier sa structure. "Dans certains endroits où l'on pensait que la calotte reposait sur la terre, nous avons décelé l'océan au-dessous, ce qui indique que le glacier est de fait en train de flotter", a-t-il dit.
Une érosion causée par des infiltrations d'eau de mer. Du ciel, les contours de ce glacier n'apparaissent pas, car le continent antarctique est couvert d'une épaisseur de neige et de glace de plusieurs kilomètres. Des études récentes ont déjà montré que le glacier était érodé par en-dessous via des canaux apportant de l'eau de mer chaude. Au fil de l'érosion, la proportion du glacier flottant sur l'eau augmente, accélérant la vitesse de la désintégration. La découverte des chercheurs pourrait expliquer des périodes récentes de fonte accélérée, a ajouté Paul Winberry. "Cela peut aussi vouloir dire que le Totten sera plus sensible à l'avenir aux variations climatiques".
Selon la Nasa, entre 2002 et 2016, l'Antarctique a perdu 125 gigatonnes de glace par an. D'après M. Galton-Fenzi, le Totten contient suffisamment de glace pour élever ces niveaux de trois mètres si la totalité venait à fondre. "Depuis les années 1990, le niveau global de la mer a augmenté d'une vingtaine de centimètres et d'ici la fin du siècle, il devrait s'accroître de jusqu'à un mètre. Mais tout ceci est très incertain, c'est pourquoi il est important d'étudier les glaciers comme le Totten", a-t-il dit. L'Antarctique concentrant 62% des réserves d'eau douce de la planète, son dégel devrait notamment contribuer à désaliniser les mers du globe, un mécanisme fatal pour de nombreuses espèces marines.