Dans une étude publiée lundi, des scientifiques américains et mexicains estiment que la sixième extinction de masse des espèces est largement sous-estimée.
L'extinction des espèces s'accélère et ne concerne pas uniquement les animaux considérés comme menacés. On pourrait résumer ainsi les conclusions d'une étude réalisée par des chercheurs américains et mexicains et publiée lundi dans les Proceedings of the National Academy of Science of the United States of America, repérée par Le Monde.
Une "sixième extinction de masse". Les principaux auteurs de ce document sont spécialistes du sujet : en 2015, certains d'entre eux avaient déjà publié un rapport dans la revue Sciences Advances, prédisant que le monde entrait dans sa sixième "extinction de masse" - la cinquième remontant à 66 millions d'années. Des extinctions qui, dans la plupart des cas, "bouleversent le statu quo et permettent à des groupes qui étaient précédemment secondaires de devenir dominants", prévenait Matthew Wills, l'un des chercheurs.
L'étude publiée lundi et réalisée à partir d'un échantillon de 27.600 espèces de vertébrés, s'inscrit dans la continuité de ce travail. D'emblée, les scientifiques posent leur diagnostic : "la sixième extinction de masse est plus importante que l'on ne croit." Pour arriver à cette conclusion, ils établissent un distinguo entre la disparition des espèces, plus lente, et celle des individus, déjà alarmante.
Un "sévère déclin de population". "Dans notre échantillon, qui comprend presque la moitié des vertébrés connus, 32% voient leur population baisser, en termes de taille mais aussi de zone géographique de répartition", écrivent les auteurs. Ces derniers se sont tout particulièrement penchés sur l'analyse détaillée des évolutions de population de 177 mammifères, entre 1900 et 2015. Tous ont perdu au moins 30% d'aire de répartition, et plus de 40% ont connu un "sévère déclin de population".
En 2016, il ne restait ainsi plus que 7.000 guépards et 35.000 lions d'Afrique (soit 43% de moins qu'en 1993) sur Terre. Les girafes ont, elles, vu leur population passer de 115.000 en 1985 à 97.000 aujourd'hui. Et, selon l'étude, ce constat ne se limite pas aux espèces reconnues comme menacées. "Nous concluons que le taux de perte de population chez les vertébrés terrestres est extrêmement élevé, même chez les espèces considérées comme peu préoccupantes", indique le rapport.
Un phénomène qui s'accélère. Les scientifiques mettent également l'accent sur l'accélération du phénomène, rappelant que près de 200 espèces vertébrées se sont éteintes au cours des cent dernières années. "Cela représente environ deux espèces par an", rappellent-ils. "Or, si l'on se fie au taux d'extinction "normal" de ces deux derniers millions d'années, ces 200 espèces auraient dû mettre jusqu'à 10.000 ans à disparaître."
Rappelant que "la disparition des populations précède toujours l'extinction des espèces", les chercheurs estiment donc que "la sixième extinction de masse est bien plus avancée que ce que l'on croit" et déplorent que la communication sur le sujet ne se concentre que "sur quelques centaines d'espèces". Selon eux, "la fenêtre de tir pour une action efficace" n'est plus que de "deux à trois décennies", après quoi l'extinction, due à la disparition des habitats et à la surexploitation par l'homme, mais aussi au changement climatique, ne pourra plus être enrayée.