Environnement : cet artiste plasticien utilise de la dentelle pour sauver les massifs de corail

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© PHILIPPE HUGUEN / AFP
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Romain David , modifié à
Frappé par la similitude entre la dentelle fabriquée au Puy-en Velay et la structure des coraux, Jérémy Gobé, invité de La France bouge sur Europe 1, a mis en place avec le Muséum d'Histoire naturelle une expérience inédite de réimplantation.
LA FRANCE BOUGE

Du corail qui pousse sur de la dentelle. Non, il ne s'agit pas d'un délire créatif directement sorti de la Fashion Week, mais d'une expérience environnementale bien réelle. Pour stopper la destruction de la grande barrière de corail, un artiste plasticien et une usine de Haute-Loire ont eu l'idée d'utiliser de la dentelle à la manière d'un tuteur, pour permettre au corail de pousser plus facilement. En effet, avec le réchauffement climatique et la pollution des océans, ces polypes particulièrement fragiles peinent de plus en plus à se fixer sur les récifs pour pouvoir se développer correctement.

Un point de dentelle similaire à la structure naturelle du corail. "L'idée était de relier l'art, la science et l'industrie autour d'un projet à la fois porteur, viable économiquement et qui soit un modèle pour la société", explique au micro de Raphaëlle Duchemin, dans La France bouge sur Europe 1, Jérémy Gobé, le plasticien à l'origine de cette trouvaille. "J'ai deux sources d'inspiration dans mon travail : les usines en fermeture et les savoir-faire oubliés, que j'essaye de remettre en jeu à travers des œuvres, et de montrer en quoi ils ont encore des résonances avec notre société contemporaine", explique-t-il.

>> De 12h30 à 14h, c’est La France bouge avec Raphaëlle Duchemin sur Europe 1. Retrouvez le replay de l’émission ici

À l'occasion d'une exposition à Clermont-Ferrand, il entend parler de la Scop Fontanille, installée au Puy-en Velay et spécialisée depuis 1860 dans la fabrication de dentelle industrielle. "À ma première visite, j'ai découvert le point de dentelle local, qui est le point 'd'esprit', et dont le motif ressemble vraiment aux squelettes coralliens que j'utilise dans mes œuvres plastiques", indique-t-il. "Je connaissais l'urgence environnementale liée au corail, tout de suite ça a fait tilt !".

"On a créé un protocole scientifique". Présentée au Muséum national d'histoire naturelle, son idée a rapidement séduit. "La recherche actuelle en biologie marine autour de la préservation du corail essaye de trouver un substrat, c'est-à-dire un tuteur, pour développer du corail et de nouvelles colonies", précise-t-il. La finesse de la dentelle permet de laisser passer la lumière, essentielle au développement du corail, mais surtout, fabriquée en coton, elle est biodégradable et ne libère aucun produit chimique en se détériorant. "Avec Isabelle Domart-Coulon (chercheuse au Muséum national d'histoire naturelle, ndlr), on a créé un protocole scientifique, et l'aventure a commencé".

L'utilisation de la dentelle s'est révélée viable dans deux cas de figure : à la fois lorsqu'il s'agit d'y greffer une bouture, c'est à dire un morceau extrait d'une colonie déjà existante, mais aussi pour le développement des larves, expulsée par les coraux, et qui deviendront à leur tour des polypes, voire des colonies. "On a fait tous les tests en laboratoire, qui sont vraiment concluants, et on part le mois prochain en mer Rouge pour faire des tests in situ", s'enthousiasme Jérémy Gobé.