C'est un rôle à mi-chemin entre le monde des blouses blanches et celui des costumes cintrés : être chercheur et entrepreneur relève-t-il de la mission impossible ? Xavier Duportet, fondateur de la start-up Eligo Bioscience, spécialisée dans le développement d'antibiotiques capables de trier les bonnes et les mauvaises bactéries, est venu expliquer sur Europe 1, lundi, pourquoi occuper ce double rôle était possible malgré les nombreuses difficultés.
Manque de "role models" en France
Invité de La France bouge, Xavier Duportet a lancé son entreprise en 2014 avec son ami David Bikard. Avec un atout : "J'ai eu la chance de faire ma thèse entre Inria à Paris et le MIT à Boston, où la plupart des professeurs sont aussi fondateurs de start-up", raconte-t-il. Pour lui, il y une vraie différence de mentalité entre les deux côtés de l'Atlantique : "Aux États-Unis, ils ont eu la chance d'avoir Elon Musk. On manque clairement de role models" en France, estime-t-il en référence au fondateur vedette de Tesla ou SpaceX.
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"Au fur et à mesure de rencontres avec des chercheurs et entrepreneurs inspirants de Boston, on s'est dit qu'on avait peut-être quelque chose à faire avec la technologie qu'on est en train de développer, que pour la pousser, pour soigner des gens, il faut sortir de l'université et monter une boîte pour la développer", poursuit-il.
" Ça prend entre 10 et 15 ans pour arriver sur le marché dans le domaine pharmaceutique "
Reste que tout n'est pas qu'une question de mentalité et que se lancer en tant qu'entrepreneur dans le domaine de la santé est plus compliqué que dans le monde "classique" des start-up du numérique, avance Xavier Duportet. "Avant d'avoir un produit dans le domaine pharmaceutique, ça prend beaucoup du temps, entre 10 et 15 ans avant d'arriver sur le marché. Les taux de succès sont de l'ordre de 5%, à peine."
Premiers essais cliniques espérés pour 2020
"Ce qui est très compliqué avec la biologie et la médecine, contrairement à l'informatique, c'est que les paramètres sont des milliers et des milliers", détaille-t-il. "Ça prend des dizaines et des dizaines de millions d'euros, voire des milliards, pour passer de ce qui marche en laboratoire, en boîte de Pétri, puis chez les animaux, puis chez les humains, avec des phases cliniques."
Eligo Bioscience a notamment levé 20 millions d'euros en septembre 2017 pour poursuivre ce développement. Aujourd'hui, sa société compte une trentaine de salariés et prévoit des essais cliniques d'ici 2020. Si ces tests sont concluants, la commercialisation de ces antibiotiques du futur est prévue pour l'horizon 2024-2026.