En avril dernier, le ministère de l'Agriculture indiquait que le risque de propagation de la bactérie "tueuse d'oliviers" était écarté, après l'analyse d'un plant de caféier malade découvert au marché de gros de Rungis. Jeudi, pourtant, le même ministère a annoncé, d'après des informations de la préfecture, l’existence d’un premier cas de Xyllela Fastidiosa - la bactérie tueuse d'olivier - détecté en pleine nature à Propriano, en Corse.
"Arrachage des plantes concernées". La présence de la bactérie a été décelée sur une haie en bordure d'une zone artisanale de Propriano, a précisé le ministère.
Dans un communiqué, la préfecture d'Ajaccio explique que la Xylella fastidiosa "a été identifiée aujourd'hui en Corse-du-Sud sur des plants de Polygale à feuille de myrte (Polygala myrtifolia) dans une zone commerciale de la commune de Propriano".
La préfecture de Corse a annoncé vendredi de nouvelles mesures de lutte contre la bactérie. Dans un rayon de 100 mètres autour de la grande surface où a été découverte la bactérie, "la désinsectisation intégrale de la zone a été effectuée par le service de lutte antivectorielle du Conseil départemental". Les forestiers-sapeurs ont procédé vendredi à "l'arrachage et la destruction de l'ensemble des végétaux" dans ce périmètre et cette opération se poursuivra durant toute la fin de semaine "jusqu'au traitement complet de la zone." Par ailleurs, une enquête épidémiologique, menée par la direction départementale de la cohésion sociale et de la protection des populations de Corse-du-Sud "se poursuit avec l'identification d'autres plants issus du même lot que les végétaux confirmés positifs et sur lesquels des prélèvements ont été effectués", selon la préfecture.
Des restrictions d'exportations. La France a pris depuis avril dernier des mesures d'interdiction à l'importation. Elles concernent les caféiers et autres végétaux venant des pays tiers, hors UE, concernés par la bactérie. L'interdiction concernent aussi les végétaux en provenance de la région italienne des Pouilles, où la "xylella fastidiosa" sévit de façon virulente depuis 2013. Mais ces interdictions sont difficiles à appliquer sur les produits qui transitent via d'autres ports européens avant d'arriver dans l'Hexagone. D'où le souhait de la France d'harmoniser les tests de détection de la bactérie à l'échelle européenne.
En Corse, un moulin à moudre les olives pour en faire de l'huile.
Un danger pour l'huile d'olive corse... La France, 17e productrice d'huile d'olive au monde avec 4 millions d'oliviers, auraient bien sûr à perdre si Xylella fastidiosa se répandait sur son territoire. En Corse, 7.000 hectares d'oliveraies sont comptabilisés dont 2.100 sont en production. En 2014, l'île a fabriqué 170 tonnes d'huile d'olive, une production en hausse qui profite des autres récoles méditerranéennes en souffrance à cause de Xylella fastidiosa et de la mouche de l'olive.
La région des Pouilles en Italie a déjà, elle, particulièrement souffert de Xylella Fastidiosa. 10% de ses 11 millions d'oliviers ont été infectés et donc abattus. Une des premières régions productrices d'huile d'olive dans le monde, elle a perdu pour le moment 53 millions d'euros à cause de la bactérie, une catastrophe pour ce coin le plus pauvre de l'Italie.
... mais aussi pour le vin français. Si la France peut craindre, c'est plus pour son vin que pour son huile d'olive. La bactérie s'attaque en effet aussi aux vignes. La Californie, aux Etats-Unis, qui en souffre depuis le 19e siècle, a même dû procéder à des arrachages de pieds dans les années 1990 et utilise désormais des variétés tolérantes.
Qui est Xylella fastidiosa ? Cette bactérie, qui se répand en se faisant transporter par les insectes, est capable de s'en prendre à plus de 200 espèces, l'ensemble des arbres (olivier, prunier, amandier, chêne, caféier…) et certains végétaux (laurier, luzerne). Logée dans les canaux où circule la sève, elle se répand dans tout l'arbre et le dessèche peu à peu. Les insectes qui aspirent cette sève, deviennent, eux, des vecteurs potentiels de la maladie.
Si Xylella inquiète tant, c'est qu'il n'existe aujourd'hui aucun moyen efficace de lutte. Une fois un arbre atteint, la seule mesure est de l'arracher. Perversité de cette bactérie, certains plants, porteurs de Xylella, peuvent être asymptomatiques, c'est-à-dire qu'ils ne présentent aucun signe de la maladie, de quoi favoriser son expansion.