Rien ne va plus pour le groupe suisse Petroplus et sa filiale de Petit-Couronne, en Seine-Maritime, est la première à payer les pots cassés. La raffinerie a déposé le bilan mardi et s'est déclarée en cessation de paiement.
"Petroplus Raffinage Petit-Couronne a déposé une demande de mise en redressement judiciaire auprès du tribunal de commerce de Rouen et s'est déclaré en cessation de paiement pour protéger la société après l'annonce de l'insolvabilité de la maison-mère", a déclaré un porte-parole. "Un administrateur judiciaire et un mandataire vont être nommés et c'est désormais sous l'égide du tribunal qu'on va chercher des liquidités et explorer les pistes pour une possible reprise", a-t-il ajouté.
La maison-mère du groupe, propriétaire de cinq raffineries en Europe, ne va pas mieux. Le raffineur suisse ne peut plus payer ses dettes et se prépare à la faillite. Dans un communiqué, le groupe précise qu'un dossier d'insolvabilité sera déposé dès que possible.
1,75 milliard de dollars de dettes
N'étant pas parvenu à trouver un terrain d'entente avec ses banques, une procédure d'insolvabilité a en effet été ouverte. "Nous avons travaillé d’arrache-pied pour éviter cette issue mais nous ne sommes finalement pas parvenus à un accord, compte tenu d’un marché du crédit et du raffinage difficile en Europe", déclare le PDG Jean-Paul Vettier, cité dans le communiqué.
Les causes de cet échec des négociations : un défaut sur les obligations du groupe et autres emprunts convertibles pour un montant de dettes qui s'élèvent à 1,75 milliard de dollars. Petroplus n'est en effet plus en mesure de régler 80 à 90% de ses dettes dans un délai deux à trois semaines. Le conseil d'administration se prépare donc à la mise en faillite en Suisse de la société et de ses filiales à l'étranger.
Les syndicats redoutent la colère des salariés
Les syndicats de Petroplus en France ont, dans la foulée, mis en garde contre la colère croissante des salariés, soulignant les risques de débordement si la situation n'était pas débloquée rapidement. "Actuellement, nos revendications on les porte calmement. (...). Mais, et c'est ce qu'on va redire tout à l'heure au ministre, si rien ne se passe (...) certains salariés sont prêts à faire péter la baraque", a prévenu Yvon Scornet, responsable CGT de Petroplus et porte-parole de l'intersyndicale (CGT, CFE-CGC et CFDT).
"On ne lâchera les stocks (de la raffinerie de Petit-Couronne, ndlr) que quand on sera sûr qu'ils ne partiront pas ailleurs", a-t-il ajouté, évaluant leur valeur à 200 millions d'euros. "Ce n'est pas des menaces. Il s'agit de dire: 'puisqu'on ne veut plus de nous, on ne rendra pas la raffinerie'. C'est ça qui peut être dangereux", a-t-il ajouté, évoquant le "ras-le-bol de collègues qui ont trente ans de raffinerie et sont maintenant jetés dehors".
"S'assurer que les activités soient proprement bouclées"
Cette procédure d'insolvabilité empêche Petroplus de déplacer ses avoirs d'un pays à l'autre dans le but d'améliorer sa situation juridique. Petroplus va demander le sursis concordataire dans tous les pays où il est présent (France, Allemagne, Belgique, Grande-Bretagne, Suisse), afin de protéger les intérêts de ses créanciers.
"L’objectif principal du conseil d’administration est d’assurer que les activités soient proprement bouclées et de préserver la valeur pour toutes les parties", a précisé Petroplus dans son communiqué. L'ouverture d'une procédure d'insolvabilité engage également les créanciers à ne plus poursuivre le groupe de raffinerie suisse.
Trois des cinq raffineries à l'arrêt
Sur les neuf premiers mois de son exercice 2011, le raffineur indépendant a perdu plus d'un million d’euros par jour. Si bien que ses banques ont décidé de lui couper les vivres, empêchant l’entreprise d’acheter du brut pour alimenter ses cuves.
Pétroplus a donc mis à l'arrêt, en janvier dernier, trois de ses cinq raffineries : celle de Petit-Couronne en France, mais aussi celle d'Anvers, en Belgique, et de Cressier, en Suisse. Malgré l'intervention des politiques dans ce dossier, et notamment celle du ministre de l’Economie, François Baroin, qui avait saisi la Médiation du crédit, l'avenir de la raffinerie s'assombrit.