L'INFO. Est-ce bientôt la fin de l'affaire Bettencourt pour Nicolas Sarkozy ? La cour d'appel de Bordeaux rend mardi un arrêt très important car susceptible de faire s'effondrer le volet de l'affaire Bettencourt dans lequel est notamment poursuivi l'ex-président : elle dira si l'expertise de Liliane Bettencourt concluant à son état de faiblesse est valide ou non. En effet, dans ce volet, la quasi-totalité des douze mis en examen sont soupçonnés d'avoir profité de la sénilité de l'héritière du groupe L'Oréal pour en obtenir de l'argent ou des avantages. Pour sa part, Nicolas Sarkozy est soupçonné d'avoir soutiré de l'argent à Liliane Bettencourt pour sa campagne de 2007.
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Pourquoi l'expertise est-elle remise en question ? La décision de la cour d'appel de Bordeaux porte sur l'expertise médicale qui a permis au juge Jean-Michel Gentil de penser que certains, dont Nicolas Sarkozy, ont abusé de l'état de faiblesse de l'héritière de L'Oréal pour profiter de ses largesses financières. Problème : ce document est signé par le professeur Sophie Gromb, qui se trouve être aussi une amie proche du juge d'instruction. Pour preuve, cet expert a été le témoin de mariage du magistrat, ce qui permet aux avocats de la défense de douter de son impartialité. L'argument a été longuement plaidé en juillet dernier avec 11 heures d'audiences au total pour toutes les demandes d'annulation : un marathon de procédures. Si les magistrats décidaient mardi d'annuler cette pièce du dossier, ce serait ainsi une victoire des avocats de la défense face au juge Gentil, leur "bête noire". Cela reviendrait également à remettre en cause trois années d'instructions menées par plusieurs juges et, en coulisses, plusieurs avocats confient qu'ils n'y croient pas beaucoup.
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L'expertise invalidée signifierait-elle la fin de l'affaire ? Non, explique au micro d'Europe 1 Me Antoine Gillot, l'avocat de l'ex-comptable de l'héritière de L'Oréal, Claire Thibout, dont le témoignage a joué un rôle clé dans cette affaire. "C'est un élément important parce que cette expertise a fait remonter jusqu'à 2006 l'état de faiblesse médicale de madame Bettencourt. Je rappelle néanmoins que cette expertise n'est pas la seule preuve dans le dossier de l'état de faiblesse de Liliane Bettencourt puisqu'il y a également de très nombreux témoignages, notamment de membres du personnels qui rapportent qu'elle n'était pas libre de son jugement et de ces décisions depuis plusieurs années", précise le conseil. Quelle conséquence aurait donc une invalidation de l'expertise ? "Ce ne serait certainement pas la fin de l'affaire Bettencourt pour une raison simple. L'abus de faiblesse n'est pas le seul délit qui a été relevé dans cette affaire, il y en a bien d'autres, comme la corruption ou la fraude fiscale et donc quelle que soit cette décision l'affaire n'est évidemment pas terminée", assure-t-il.
Et si l'expertise était validée ? Dans l'hypothèse, où il n'y aurait ni annulation de l'expertise ni récusation des juges - en juin dernier, l'avocat général près la Cour de cassation requit un dépaysement du dossier - ces derniers devraient donc être en mesure dans les prochaines semaines de rendre enfin l'ordonnance par laquelle ils diront qui, des douze mis en examen de ce volet le plus médiatique de l'affaire Bettencourt, doit être jugé par le tribunal correctionnel, et qui doit en définitive bénéficier d'un non-lieu. Le 28 juin, le parquet de Bordeaux a requis six non-lieux. Il a notamment considéré "qu'aucune charge" ne pèse contre Nicolas Sarkozy et son ancien trésorier de campagne, l'ex-ministre Eric Woerth. Il a requis cependant le renvoi au tribunal de l'autre moitié des protagonistes, comme Jean-Marie Banier et Patrice de Maistre. Selon le Canard enchaîné paru mercredi, le juge Gentil serait prêt à accorder un non-lieu à l'ex-président de la République, ce qui serait une marque d'apaisement après le bras de fer médiatique entre le juge et l'ex-chef de l'Etat au moment de sa mise en examen en mars.